Sur le sommet de la colline, aux pentes escarpées et boisées dominant la plaine où serpente la Meurthe, et qui sert de contrefort au plateau parc Lattier - ancien fief de Frouard - s’élève une tour qui pointe vers le ciel, dans une échancrure du rideau de verdure de la futaie d’alentour, sa toiture en poivrière : c’est la Tour du Chevalier.
Sa construction remonte à cette époque lointaine qu’enveloppent les ténèbres épaisses du moyen âge. Son ancienneté fort reculée ne pouvait manquer de créer autour d’elle fiction légendaire ; c’est ainsi que la tradition populaire nous a légué la légende, toute parfumée d’amour, de la Tour du Chevalier.
Le promeneur, que séduit l’attrait des choses d’autrefois et qui fera de la tour légendaire le but de ses pèlerinages du souvenir, pourra l’atteindre en confiant ses pas vagabonds au sentier qui longe le ruisseau d’Herbévaux, limitant les bans de Champigneulles et de Frouard et duquel on disait autrefois :
Sans pain, ni sans Sâ,
Te ne sautrème le rupt d’Herbeva.
Mais que notre promeneur ne s’avance pas dans le vallon où coule ce ruisseau avec l’indifférence des foules qui passent non loin de là et qui ignorent le passé ; qu’il se souvienne donc qu’en ces lieux, Lorrains et Messins vidèrent un jour une de leurs nombreuses querelles. C’était en 1230 et, ce jour-là, les eaux du ruisseau d’Herbévaux furent rougies du sang des combattants.
Que notre rêveur évoque aussi le souvenir de ce soldat du nom de Frisson qui, dans cette rencontre, se sacrifia pour sauver la vie de son duc « s’ébattant au milieu de la meslée avec pique et sans armure, jeta son propre corps entre li et les dagues ennemies, dont reçut vingt-deux coups, et li mourut éz pieds du généreux duc, criant à tous : N’y faillez, c’est mon prince, ne versez son sang, pour l’amour de Dié ».
Ce tribut du souvenir payé à l’Histoire de notre Lorraine, continue ton chemin, pèlerin du culte de la Légende, et arrive au pied de la Tour, après avoir escaladé la colline, apprends que cette construction, aussi haute que les plus grands chênes de la forêts, et dont l’intérieur est entièrement occupé par un escalier en spirale, fait de pierre de taille, a été édifiée par un chevalier - d’où le nom donné à cette tour - à qui l’amour avait communiqué assez de force pour accomplir ce travail.
Le sentiment que tu épourveras alors, sera un mélange confus d’admiration et d’étonnement.
Ce chevalier aimait... L’amour n’est-il pas l’apanage de la chevalerie ? Mais sa famille, au coeur dur comme pierre, ne voulait pas qu’il aimât celle pour laquelle son coeur s’était passionné.
Pour mettre obstacle à cet amour, elle fit enfermer dans un couvent la fiancée qu’il s’était donnée, l’accusant qu’elle « fut en un certain village et consulta bons sorciers et nécromanciennes, qui, au dit village, faisaient honneste commerce et vendanges de certains philtres d’amour et breuvage pour rendre gens amoureux.
...En face de la Tour du Chevalier, à l’autre extrémité de la plaine, les maisons de Bouxières-aux-Dames, appelé Sainte-Marie-du-Mont au temps de notre récit, escaladent, en s’appuyant les unes contre les autres, les pentes rapides d’un riant coteau, au sommet élargi, sur lequel un monastère de religieuses avait été fondé au dixième siècle par Saint Gauzelin, évêque de Toul.
Ce monastère, richement doté de reliques précieuses, objet de la dévotion publique, à quelques-unes desquelles il devait une partie de son illustration, fut au cours du moyen âge fertile en miracles.
Les filles qui peuplaient cette abbaye avaient pris le titre de Chanoinesses et n’admettaient dans leur chapitre que des demoiselles de condition. Mais, dans la suite, on les appela Servantes de Bouxières, parce qu’elles s’étaient trouvées dans la nécessité de se livrer à divers travaux manuels.
A la fin du dix-huitième siècle, le chapitre obtenait une bulle qui autorisait la translation de l’abbaye à Nancy ; parmi les motifs qu’il fit valoir, nous relevons ceux-ci :
« La maison est établie sur une montagne environnée de forêts et presque toujours infestées de brigands, et séparée de Nancy par la Meurthe, dont les fréquents débordements interceptent toute communication avec cette ville : cette situation l’expose à une foule de dangers. »
C’est dans ce monastère de Bouxières-aux-Dames que la fiancée du chevalier avait été enfermée. La jeunesse de cette vierge, arrachée à la vie, s’y étiolait comme s’étiole la rose arrachée au rosier...
Mais chaque soir, à l’heure où les étoiles ouvrent leurs yeux brillants dans la voûte assombrie du firmament, le chevalier allumait sur la plateforme de la Tour un brasier pour annoncer à la jeune captive, alors accoudée à la fenêtre de sa chambre, qu’il lui gardait sa passion.
Et la douleur insupportable que provoquait chez le chevalier les affres de l’amour ne s’atténuaient que lorsque la flamme du souvenir empourprait les coteaux envirronants, faisant en même temps rêver la jeune fille.
Elle rêvait, la captive, courir par les sentiers herbeux, cueillir le muguet et la pervenche sous les frondaisons printanières, fuir ensemble, errer de vallée en vallée et vivre dans quelque contrée lointaine. Mais, à ces rêveries, succédaient aussitôt des pensées pleines d’amertume : que faisait-on de son droit à l’amour et de sa part au soleil ? pensait-elle en s’insurgeant contre le destin.
Vers cette époque, des bandes d’aventuriers, soudards, lansquenets, piétons allemands à la solde du roi de Bohême, « viendrent en notre pays par le Salnois - la Seille - brûlant, pillant couvents et villaiges, partout où ils passaient, faisaient oeuvre inhumaine.
« Frappant dessus les pauvres gens des villaiges, les tuants, les meurtrissant comme bêtes et brûlant tout et n’y laissant maison entière. »
Une de ces bandes de Hongrois ou ogres et de Sarrazins, sous les ordres du seigneur de Kerprisheim, se présenta, au coucher du soleil, à la porte du monastère de Bouxières-aux-Dames.
« Très noble et grande dame, haute justicière, supérieure de cette maison de prière, cria le chef, ouvrez à haut et puissant seigneur, baron de Kerprisheim, et à ses hommes d’armes et compagnons d’aventure, ainsi en ordonnent les lois de la guerre et ses rigueurs, sans forfaiture, ni déshonneur en notre Vierge Sainte, pour vos filles. »
Que pouvait opposer la supérieure de ce manoir abbatial à la force de cette soldatesque ? Sa ruse de femme : elle n’y faillit.
« Très haut et très puissant seigneur, baron de Kerprisheim, répondit-elle, en jetant vers la Tour un regard d’espérance, nuancé d’inquiétude et en portant langueur et gracieuseté dans son langage, ce soir les humbles servantes de Bouxières reçoivent à honneur Sa Grandeur Monseigneur l’Evêque de Metz, qui se rend par étapes au grand pèlerinage de Saint-Nicolas-du-Port avec nombreuse escorte. D’ailleurs, son arrivé sera annoncée par un feu d’hommage, allumé sur la colline voisine. »
Au même instant, la torche immense qui, chaque soir, jetait dans la vallée des lueurs d’incendie, s’allumait sur la Tour.
Le baron de Kerprisheim, fort dépité, mais ne pouvant ignorer la toute-puissance de l’évêque de Metz et la valeur des hommes d’armes de son escorte, estima qu’il serait téméraire d’engager un combat dont le résultat était trop certain. Aussi préféra-t-il différer et remettre à la nuit suivante le coup de force qu’il avait prémédité contre le manoir des Dames chanoinesses.
Simulant donc un départ vers un autre objectif, il embusqua sa troupe dans les grands bois d’alentour, bien déterminé à mettre son projet à exécution le lendemain, dès que les ombres complices envelopperaient son forfait.
L’intelligence d’une femme, par l’invention de l’arrivée du puissant prélat, à laquelle le feu de la Tour donnait une apparence de réalité, avait ce soir-là sauvé le couvent de la violence des soudards et de la pire des injures.
Dans la matinée du lendemain, après avoir entendu la messe, et malgré une pluie de déluge, la supérieure s’en vint, en toute diligence, à la cour du duc de Lorraine, faire le récit, à Son Altesse très chrétienne, de l’aventure de la veille, et exposer en même temps le danger qu’avaient couru les saintes filles dont elle avait charge d’âmes.
Elle ne manqua pas de faire valoir l’intervention miraculeuse de la flamme de la Tour du Chevalier.
Et notre prince, défenseur de la foi, ne pouvait s’empêcher de voir dans ce flambeau s’allumant dans les fenêtres s’allumant dans les ténébres, l’accomplissement d’un arrêt du destin, rentrant dans les vues de la Divinité. Aussi s’empressa-t-il de faire bon accueil à la demande de la supérieure et de lui confier la petite troupe qu’elle sollicitait pour repousser toute tentative scélérate de ces Bulgares ou bougres.
Mais quand les gens d’armes, ayant à leur tête la supérieure, arrivèrent dans la vallée de la Meurthe, les eaux, gonflées par les pluies tombées depuis la veille, formaient une immense nappe liquide et furieuse, qui eût entraîné le téméraire se hasardant sur l’antique voie de Nancy à Saint-Mihiel, laquelle, comme aujourd’hui, traverse la prairie jusqu’au pont de Bouxières-aux-Dames.
L’inondation, en coupant toute communication, servait les projets du baron Kerprisheim ; alors que les chanoinesses, des fenêtres du couvent, assistaient à la ruine de leur espérance. Et la pensée seule, d’être le soir même les victimes d’une violence au service de grossiers soudards, les enveloppait d’une terreur mêlée de délire.
Dans le désarroi général que causait à ces filles « qui n’étaient point convoiteuses èz esbats d’amour », une telle éventualité, la fiancée captive, à qui le feu symbolique de chaque soir mettait au coeur, avec l’espoir, une force surnaturelle, avait conservé tous ses esprits.
Alors prenant dans ses mains fluettes la châsse contenant les reliques de saint Gauzelin, elle descendit vers la Meurthe : la foi qui soulève les montagnes donne toujours une grande espérance dans ce que l’on croit possible.
Après avoir franchi le pont de bois qui tremblait sous les coups de la rivière en fureur, et confiante dans les puissance des reliques qu’elle portait et qu’elle savait être grande, jusqu’à soustraire les eaux aux lois de la nature, elle s’engagea sur la route submergée.
O miracle ! Voilà que les eaux se séparent: celles qui étaient en amont remontent vers la source et celles qui étaient en aval fuient le courant ; et, dans le libre passage établi, la jeune vierge rejoignit la troupe de secours qui l’attendait de l’autre côté des flots et qui l’accueillit avec des transports d’allégresse.
Suivie de cette escorte, la jeune captive refit le même trajet entre les eaux contenues par ce prodige, comparable à celui que l’Arche d’Alliance avait accompli sur le fleuve du Jourdain, les eaux ne reprirent leurs cours naturel que lorsque le dernier archer eut franchi le pont qui reliait les deux rives.
Après un cantique d’action de grâces « Célébrons tous ensemble le Seigneur ! Exaltons ensemble son nom. Il nous a exaucé. Il nous délivrera de nos ennemis », chanté dans la chappele de l’abbaye - dont les vestiges attestent son caractère d’élégance architecturale - et dans lequel se confondaient les voix douces des femmes et les voix rudes de nos hommes de guerre, les troupes furent disposées d’après le plan arrêté par le maistre du camp de la cour de Lorraine.
Quand au crépuscule, la bande de scélérats du baron de Kerprisheim, à la faveur des ombres des grands arbres de la pelouse s’approchèrent du monastère, les soldats de notre duc l’enveloppèrent et la mirent en quartiers : de longtemps, on n’entendit plus parler de brigandage dans la contrée.
L’abbesse mitrée de Remiremont, qui avait en suzeraineté l’abbaye de Bouxières, à qui toutes ces choses merveilleuses furent dites avec grand détail, n’y resta pas insensible et elle tint à sanctionner sa gratitude en donnant aux deux fiancés son autorisation de mariage, à laquelle elle dédaigna joindre sa bénédiction épiscopale.
C’était trop d’émotions pour un coeur délicat. Ce suprême hommage, comme le dernier coup de vent de la tempête, brisa le lis blanc, et la vierge s’écroula dans les bras de la supérieure, ouverts à temps pour la recevoir : elle s’y endormit pour l’éternité dans la paix du Seigneur :
Faible fleur brisée au souffle du bonheur.
Les chanoinesses la pleurèrent. Elles témoignent avoir vu son âme blanche s’envoler vers le ciel bleu, où elle attend celui qu’elle a tant aimé. De ce jour la flamme symbolique ne se ralluma pas. Et le chevalier, sentant venir la mort, creusa dans le roc, au pied de la Tour, son tombeau où bientôt il devait descendre. Son âme, dit-on, rôde encore dans ces lieux qu’elle ne doit pas quitter que pour aller rejoindre un jour l’âme de celle qu’il a tant aimée et qui l’attend toujours dans le ciel bleu, où enfin elles vivront dans une félicité éternelle.
A ton retour, après tes dévotions au culte des vieilles pierres, arrête tes pas, promeneur - dont le nom est inutile à dire, car il n’a été que l’occasion de détails en vue de situer la Tour arrête tes pas, promeneur, près des peupliers plantés en bordure du ruisseau d’Herbévaux, et évoque le souvenir des deux héros de la tradition populaire en écoutant le vent qui souffle à travers le feuillage légèrement agité, il t’apportera un écho lointain de la romance populaire, doux comme le murmure d’une prière d’espèrance, mais que n’entendent pas ceux qui ont été parjures aux serments de l’amour :
Ah ! je t’attends, je l’attends, je l’attends
Celui que j’aime, que mon coeur aime.
Ah ! je t’attends, je l’attends, je l’attends
Celui que mon coeur aime tant.
Interprétation de la Légende de la Tour du Chevalier:
Cette tour, j’ai eu la chance de la voir dans ma jeunesse avant que l’idiotie des gestionnaires de la ville de Frouard de l’époque ne la détruise plutôt que de la rénover ! Bien évidemment, on peut le leur pardonner à moitié pour ne pas avoir su la réelle utilisation de cette tour, mais tout de même, la légende était bien là ! Et une tour toute seule en un lieu d’observation aussi grandiose sans un château devait bien servir à quelque chose, non ?
Elle ne méritait pas un tel sort ! Et il serait bon, pourquoi pas, d’en reconstruire une autre à l’identique. Cette tour se trouvait sur le ban de Frouard aux cités Bellevue sur le point culminant de 328,6 derrière le lieu dit Saule Gaillard à la racine du nez d’Hermès juste en dessous de l'oeil !
Sa présence est indiquée sur les vielles cartes IGN, elle est juste sur le point de culmination, devant les bâtiments ouvriers. Si on trace une droite de ce point à la Fontaine des Vaches, on trouve comme angle par rapport à l’axe Nord-Sud 60°, qui est une valeur de déplacement solaire. D’ailleurs, en prolongeant cet angle, on tombe sur une hauteur de 406 m, un point culminant Grand Couronné.
Sans pain, ni sans Sâ,
Te ne sautrème le rupt d’Herbeva.
Masson : sans Sâ autrement dit sans Sel ! Nul doute qu’en cet endroit nous soyons en un lieu central d’observation identique à celui du Sâ de Belleau dans le Val de la Natagne. Il n’est donc pas étonnant que des restes d’un petit fanum y aient été trouvés.
« La maison est établie sur une montagne environnée de forêts et presque toujours infestées de brigands, et séparée de Nancy par la Meurthe, dont les fréquents débordements interceptent toute communication avec cette ville: cette situation l’expose à une foule de dangers. »
L’observation de Sothis servait à annoncer les inondations du Nil. Existait-il une inondation de la Meurthe similaire à celle du Nil, c’est-à-dire à la même date du 18 juillet ? D’où la nécessité d’observer le lever Sothiaque en Lorraine. A moins que les celtes en aient eu aussi besoin pour déterminer leur départ de cycle astronomique ce qui serait plus plausible. On retrouve la même géographie qu’en Egypte avec le Delta de Champigneulles en sortie de la Gueule du loup avec la courbe que suit la Meurthe en cet endroit similaire à celle du Delta du Nil. Mais ce qui va conforter la Thèse de l’observation du lever Sothiaque à la Tour du Chevalier va être la présence de la ville de Lay-Saint-Christophe et la recherche sur ce que représentait Saint Christophe que nous analyserons au dossier sur le Grand Couronné, Kernunos.
Cette Tour était non seulement dédiée au levé Sothiaque mais aussi au lever du soleil et de la lune ! Le nom grec Hermès doit être identifié avec le sanscrit Sârameya, nom du chien céleste que l’on invoquait comme dieu du sommeil, gardien de la maison et préservateur des maladies.
Nous obtenons ici un nouveau renseignement nous permettant d’indiquer qu’Hermès observait le chien céleste, Sirius que la tradition celtique appelle chien de culann. Cùchulain, dans la mythologie irlandaise, était le guerrier et champion de l'Ulster. Il aurait vécu au IIIe siècle. Son nom signifie « Chien de Culann », bien qu'on l'appelât souvent le Chien d'Ulster.
http://encycl-celt.ifrance.com/cuchulain.html
Un autre massacre du paysage et du patrimoine Lorrain a été celui de la destruction de la "raquette" qui devait à n'en point douter indiquer tout comme Liverdun un lieu précis du passage du soleil juste en face du nez d'Hermès ! Lucien Geindre la situe à la place de l'usine Delattre.
jeudi 12 avril 2007
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