lundi 23 avril 2007

Les Symboles de Mithra

Symboles où le mot Taureau est présent :

Selon le Rig-Veda l’androgyne est la vache laitière bigarrée, qui est le taureau à la bonne semence. D'après la Maladie de Cuchulainn, lors de l'intronisation du roi suprême d'Irlande, un poète (file) boit du bouillon et mange à satiété de la viande du taureau abattu pour le festin rituel. Le cerf est l’un des animaux symboliques les plus importants des anciennes cultures du monde. Il semble avoir souvent formé, avec le taureau, un couple d’opposés mythico-cosmologique comparable, d’après l’hypothèse d’historiens français, à celui que forment le cheval et le boeuf sauvages dans l’art des cavernes de la période glaciaire. Dans l’Ouest de l’Europe, le cerf accompagne le taureau ; par exemple, ces deux animaux figurent l’un à côté de l’autre sur les dessins rupestres d’Ibérie et de Ligurie. La religion gauloise elle aussi connaît cette rencontre. A Reims, le dieu aux bois de cerf fait couler de sa bourse des pièces de monnaie ; un cerf et un taureau, flanc à flanc, semblent s’abreuver à ce ruisseau. Sur le chaudron de Gundestrup, un chien, un cerf et un taureau se tournent vers Cernunnos. Le cycle de l’Ulster est centré sur le taureau, celui de Leinster sur le cerf.
le sacrifice du cerf et le retour d’Esus sur la terre étaient célébrés par des mascarades et des danses, qui se sont d’ailleurs perpétuées jusqu’à nos jours dans les fêtes du carnaval : hommes et femmes se déguisaient en taureaux et en génisses, ou en biches et en cerfs, et se livraient à des danses plus ou moins lascives pendant des jours entiers. C’était pour célébrer la renaissance d’Esus. Il n’est pas jusqu’à l’hiérogamie d’Esus, succédant au sacrifice des taureaux et figurant sur le pilier des Nautes de Paris, qui ne trouve son correspondant inattendu dans les festivités, encore vivantes au début du XXe siècle, de la mi-carême parisienne, avec sa cavalcade, son bœuf gras et sa reine des reines.
Les cornes de Bélier, note Guénon, sont de caractère solaire, les cornes de taureau de caractère lunaire. Il est de fait que l'association de la lune et du taureau est bien connue des Sumériens et aussi des Hindous. Une inscription du Cambodge désigne la lune comme une corne parfaite (voir croissant) insiste sur l'aspect cornu du taureau de Civa. Le Mahâbhârata parle de la corne de Civa, car Civa s'identifie à sa monture, Nandin.
Les cornes sont une des caractéristiques majeures des taureaux divins. Si ces derniers sont anthropomorphes, elles peuvent aussi être représentées seules (comme les cornes cultuelles de l'ancienne Crète, entre lesquelles on plantait souvent la bipène), et prennent dans ce cas une valeur symbolique plus précise. - Contrairement à une opinion largement répandue, les cornes, et particulièrement les cornes de taureau, ne sont pas toujours associées au soleil et à un régime masculin de la divinité. Il semble bien en effet que, à l'aube de l'histoire, et dans les principales civilisations agricoles, les cornes de taureau aient été intimement liées à la lune, le taureau lui-même apparaissant comme l'animal favori de la grande déesse-mère (en grec, la Potnia theron: la maîtresse des animaux). C'est ainsi que l'on voit, par exemple, dans les peintures pariétales de çatal Huyuk, en Turquie, la déesse, les jambes écartées et le ventre saillant, donner naissance à des taureaux alors que des bucranes d'argiles sont superposés sous elle et, à l'évidence, procèdent d'elle. Plusieurs milliers d'années plus tard, dans les palais minoens de Crète, le culte du taureau et le symbolisme multiplié de ses cornes sont là aussi en relation avec la puissance de la lune et la figure de la femme et de la mère divine. On peut voir là un rappel de la partition préhistorique du masculin et du féminin entre le cheval et le taureau (A. Leroi-Gourhan), ce qui expliquerait la survivance des cornes lunaires du taureau, même si elles sont devenues masculines au cours de l'évolution, aussi bien chez "le taureau des étoiles" égyptien que chez le taureau de Shiva qui est décrit d'une façon insistante comme cornu ; par métonymie, Shiva est parfois indiqué comme portant une corne parfaite qui est elle-même le croissant de la lune. - N'est-ce pas tout simplement, comme le remarque C.G. Jung, que la forme de la corne, et particulièrement celle du taureau, présente l'image d'une conjonction d'opposés et renvoie implicitement à la notion d'androgyne - puisque la corne est à la fois phallus qui s'érige et l'arme qui peut pénétrer dans une chair d'homme tandis que la paire de cornes dessine l'harmonie d'une lyre et, reposant sur le front de l'animal, métaphorise dans sa double courbe le réceptacle d'une coupe et la matrice de la femme. Suivant une autre légende, mais la valeur symbolique reste la même, la corne d'abondance serait une corne du fleuve Achéloos. C'était le plus grand fleuve de Grèce, fils d'Océan et de Téthys, la divinité de la mer ; lui-même était l'aîné de plus de 3000 fleuves et le père d'innombrables sources. Comme tous les fleuves, il avait le pouvoir de se métamorphoser dans les formes qu'il désirait. Lors d'un combat qui l'opposa à Héraclès (Hercule), pour la possession de la belle Déjanire, il se transforma en taureau ; mais Héraclès lui ayant brisé une corne, il se déclara vaincu. En échange de cette corne qu'il réclama à Héraclès, il lui offrit une corne de la chèvre Amalthée qu'il détenait. Kernunnos est souvent représenté avec des animaux, parfois avec un taureau. Dans les civilisations méditerranéennes, le boeuf représente le Taureau Céleste... On connaît en effet deux Maeve dans l’Irlande préchrétienne, l’une reine du Connaught, qui déclenche la guerre contre l’Ulster et son héros Cuchulainn (le chien de Culann) pour la possession du taureau de Cualgné (Tain Bô Cualgné: La Razzia des vaches de Cooley), l’autre, reine du Leinster, surnommée la Demi-Rouge, avec qui tout nouveau roi suprême de l’Irlande devait avoir fait l’amour pour affirmer sa légitimité (dans un inceste sous-jacent évident, puisqu’on la voit monter successivement, par exemple, dans la couche d’Art, puis de son fils Cormac Mac Art). La figure d’Hathor, dans le panthéon égyptien, résume ces différents aspects du symbole de la vache. Elle est la fertilité, la richesse, le renouveau, la Mère, la mère céleste du soleil, jeune veau à la bouche pure, épouse aussi du soleil taureau de sa propre mère. La nuit étoilée est dominée par le Taureau prestigieux dont la Vache féconde est la Pleine Lune, dont le troupeau est la Voie lactée. Selon l’Apocalypse (4, 6-8), le trône céleste est gardé par quatre animaux qui ressemblent, le premier à un lion, le second à un taureau, le troisième a un visage semblable à celui d’un homme, et le quatrième ressemble à un aigle qui vole. Acheloss, le plus grand fleuve de la Grèce antique, prend-il tour à tour les apparences du serpent et du taureau pour affronter Héraclès. Le Taureau enfermé dans le labyrinthe est également solaire. Peut-être symbolise-t-il, dans ces perspectives, la puissance royale, la domination de Minos sur son peuple. Ces dieux des fleuves étaient le plus souvent représentés comme des êtres bâtards mi-hommes mi-bêtes, par exemple comme des êtres humains à tête de taureau ou encore comme des centaures (Nessus). La coutume antique associait à ce terme le Mana créateur, extraordinairement efficace selon une expression de Lehmann, que rapporte Jung.On retrouve ce Mana dans le taureau. Avec la Vierge, nous sommes au terme du cycle annuel de l’élément Terre ; avant la terre froide du Capricorne, celle des ensemencements d’hiver ; après la terre grasse, humide et chaude, du Taureau, couverte de la végétation verdoyante et parfumée du printemps.

La découverte des équinoxes et des solstices ne pouvait que commencer par des données très approximatives. L’axe passant par deux étoiles fixes “ royales ”, Aldébaran et Antarès, termes d’origine arabe, était assez proche de l’équinoxe ou de ce qui en tenait lieu. Or cet axe stellaire exceptionnel traverse les constellations du Taureau et du Scorpion ; l’utilisation de cette coïncidence trompeuse a permis à ces deux magnifiques étoiles d’annoncer le début du printemps et celui de l’automne, tout comme Sirius annonçait aux Égyptiens les crues du Nil. Deux signes portent la marque d’une connaissance du cycle précis des saisons et du repérage des équinoxes et des solstices : le Cancer et la Balance ; mais cela ne signifie pas pour autant qu’on les ait d’emblée correctement placés. Le Cancer correspond au solstice, dit Vincent de Beauvais, dans son Speculum Naturalis , en ce que c’est un animal qui marche à reculons, ce qui est le cas du Soleil, qui s’arrête (sol-stice) et retourne en arrière, et de la Balance, qui incarne les valeurs d’équilibre équinoxial. Or, à cette place, figuraient les pinces – ou chelles – du Scorpion, qu’il fallut sacrifier pour inscrire ce repérage astronomique se trouvant à l’opposé du point vernal. Signalons qu’une constellation est un ensemble d’étoiles qui peut, a priori, être modifié à volonté selon les besoins du découpage.

La mort du dieu bienveillant Osiris était l’un des principaux récits de la mythologie égyptienne mais l’histoire a rarement été consignée en détail. Deux épisodes sont mentionnés : son meurtre et son dépeçage. Les plus anciens récits racontent simplement qu’Osiris fut déposé par son frère Seth au bord du Nil, à Nédit, lieu mythique identifié parfois avec un secteur d’Abydos, le site sacré où l’on célébrait les mystères d’Osiris. Dans des versions plus tardives du mythe, Osiris est noyé dans le Nil et Seth est cité comme le meurtrier, ayant pris la forme d’un crocodile ou d’un hippopotame pour attaquer son frère innocent. Dans une autre version, il se métamorphose en taureau et piétine Osiris. La patte antérieure qui piétina Osiris fut plus tard coupée par le dieu Horus et jetée dans le ciel où elle entra dans la constellation de la Grande Ourse. Dans une version plus tardive, Seth devient un petit insecte, peut-être un moustique, et tue Osiris en le piquant au pied.
Isis chercha son mari, utilisant ses pouvoirs magiques pour sauver son corps de la décomposition. Elle fit appel au dieu à tête de chacal Anubis qui embauma le corps d’Osiris et l’enveloppa de bandelettes, réalisant ainsi la première momie. Dans les versions plus tardives du mythe, Seth trouve le corps divin d’Osiris et le met en pièces.

Symbole du pouvoir judiciaire et de son droit d’infliger des châtiments. Les statues du dieu Min, en Egypte, le représentent le bras droit levé en équerre dans l’angle d’un fouet, fouet royale, symbole de terreur salutaire, (qui) flotte mystérieusement au-dessus de la main ouverte. Mais ce dieu était également lié aux cultes de la fécondité. Jean Yoyotte observe en effet... l’autre bras glisse sous le vêtement et la main entoure la racine du phallus divin... Telle est l’image calme en qui s’incarnait la divinité redoutable du taureau qui couvre les femelles, maître générateur dont la procession ouvrait le temps des moissons...

Les espèces prolifiques du bouc et du taureau interviennent fréquemment dans sa légende et dans son culte ; bouc et taureau étaient ses victimes de choix pour les sacrifices et, plus anciennement, dans la pratique de la mise en pièces qui s’achevait en communion sanglante.

Etoiles royales, tel est le nom généralement donné en astrologie aux quatre étoiles fixes de première grandeur, particulièrement importantes dans les thèmes. Elles furent les étoiles-repères du calendrier babylonien :

* Aldébaran, principale de la constellation du Taureau, Gardienne de l’Est ;
* Regulus, de la constellation du Lion, Gardienne du Nord ;
* Antarès, coeur de la constellation du Scorpion, Gardienne de l’Ouest ;
* Fomalhaut, du Poisson Austral, Gardienne du Sud.

Cette liste n’est pas unique et varie selon les auteurs. Ainsi, parfois, on remplace Regulus par Rigel, de la constellation d’Orion (appelé en Inde Raja, seigneur, roi, ce qui souligne son rôle d’étoile royale), et Antarès (qui est une étoile néfaste, étant le fossoyeur des caravanes chez les Mésopotamiens) par la bénéfique Spica, Epi de la vierge. Cependant, Sirius, la plus brillante étoile du ciel, ne figure jamais parmi ces étoiles royales.

Plusieurs images symboliques sont associées à chacune de ces étoiles. On représente le plus souvent Aldébaran par un oeil, Regulus par un coeur ou une couronne, Antarès (dont le nom provient d’Arès-Mars) par un poignard ou un cimeterre, et Spica par une sphinge (voir sphinx) à la tête et la poitrine de femme, ou par une gerbe.

L’étoile de Bethléem est considérée par la plupart des historiens comme une concession de l’Eglise naissante à la pensée astrologique, alors toute-puissante, et fait suite aux phénomènes cosmiques extraordinaires, semblables, qui ont précédé la naissance de presque tous les Fils de Dieu (y compris Bouddha). Ainsi, par exemple, selon des légendes tardives, la nativité d’Agni qui, comme Jésus, était déposé par sa Mère-Vierge, Maya, et par son Père terrestre, Twâstri, le Charpentier, entre la Vache mystique et l’âne, porteur du Soma, était annoncée par l’apparition d’une étoile appelée SaVaNaGRaHa.

Le champs céleste d’un signe n’est d’ailleurs pas identique à la constellation en question mais se trouve placé en face de celle-ci (ils se recouvraient à peu près il y a environ 2500 ans et c’est à cette époque que l’on a donc fixé pour la première fois le zodiaque). Un texte babylonien de l’an 420 av. J.-C. leur attribuait les noms suivants : l’ouvrier salarié (bélier), les pléïades (taureau), les gémeaux, le cancer, le lion, l’épi (la vierge avec son épi de blé à la main), la balance, le scorpion, le centaure tirant à l’arc (sagittaire), la chèvre-poisson (capricorne), le gula (verseau) et deux queues (poissons).
En Occident, les signes traditionnels du zodiaque sont divisés diversement, par exemple en trois croix auxquelles appartiennent chaque fois quatre signes : la croix cardinale - bélier, cancer, balance, capricorne, est rattachée aux quatre archanges Gabriel, Raphaël, Michel et Uriel ; la croix fixe - taureau, lion, scorpion, verseau est associée aux gardiens archaïques des quatre coins du monde (c’est-à-dire aux quatre évangélistes : Luc (taureau), Marc (lion), Jean (aigle), Mathieu (homme ou ange). Pour la croix mobile, il reste les gémeaux, la vierge, le sagittaire et les poissons. D’après les quatre éléments, on a défini quatre trigones pour chaque fois trois signes :

feu : bélier, lion, sagittaire ;
terre : taureau, vierge, capricorne ;
air : gémeaux, balance, verseau ;
eau : cancer, scorpion, poissons

A l’époque chrétienne, on aimait associer symboliquement les douze signes du zodiaque (voir Pierres précieuses) aux apôtres du Christ :

Bélier-Pierre
Taureau-André
Gémeaux-Jacob l’ancien
Cancer-Jean
Lion-Thomas
Vierge-Jacob le jeune
Balance-Philippe
Scorpion-Bartholomé
Sagittaire-Matthieu
Capricorne-Simon
Verseau-Judas
Poissons-Mathias

Les initiés aux mystères de Cybèle étaient descendus dans une fosse, où ils recevaient sur le corps le sang d’un taureau ou d’un bélier, placé sur une grille au-dessus de la fosse et rituellement sacrifié au-dessus d’eux, tandis qu’un serpent allait boire à même la plaie de la victime.

Sa tentative infructueuse du remplacement des noms païens des constellations (et des signes) par ceux tirés de l’Ancien et du Nouveau Testament semble avoir rencontré l’opposition même de ses amis et disciples. Il préconisait de baptiser le Zodiaque par les noms des 12 apôtres (le Bélier s’appelant saint Pierre, le Taureau saint André, etc.) et de donner à la constellation de la Lyre l’appellation de la Crèche de Jésus-Christ, à Andromède celle du Sépulcre, au Grand Chien le nom de David, à Hercule des Mages, etc.

Religion

L’oiseau Bennou, le Phénix héliopolitain, était à Héliopolis en qualité d’Osiris, qui lui-même était alors qualifié d’âme de Râ (l’âme de Râ s’incarnait aussi à Héliopolis dans le taureau Mnévis). L’âme de Râ et celle d’Osiris s’embrassaient et s’unissaient ; et la Divinité était en elles. Le Phénix se rattache donc au culte de Râ, en même temps qu’à celui d’Osiris ; il était le symbole des apparitions périodiques, des levers de soleil, c’est-à-dire un emblème des résurrections d’Osiris. Son nom bennou a été rapproché du mot oubn “ briller comme le soleil levant ”, mot fort semblable, dit Lefébure, à l’assyrien banû, “ brillant ”

Taureau

Texte 1

Le taureau évoque l’idée de puissance et de fougue irrésistible. le mâleimpétueux, et aussi le terrible Minotaure, gardien du labyrinthe. C’est le féroce et mugissant Rudra du Rig-Veda, dont pourtant la semence abondante fertilise la terre. Il en est ainsi de la plupart des taureaux célestes, notamment de l’Enlil babylonien.

Symbole de la force créatrice, le taureau a représenté le Dieu El, sous forme d’une statuette de bronze, destinée à être fixée au sommet d’un bâton ou d’une hampe: enseigne portative, semblable à celle du Veau d’Or. Des prototypes de ces emblèmes religieux remontent jusqu’au début du troisième millénaire avant notre ère. Le culte d’El, pratiqué par les patriarches hébraïques immigrés en Palestine, fut proscrit par Moïse. Mais il subsista jusque sous le règne de David, ainsi que l’attestent les statues du taureau sacré, influencées par l’art égyptien, remontant à cette date. De telles statues ont figuré sur la palette du pharaon Narmer, au Musée du Caire, sur l’enseigne de guerre de Mari, en Syrie Mésopotamienne ; on en a retrouvé aussi sur les plateaux d’Anatolie centrale.

Dans la tradition grecque, les taureaux indomptés symbolisaient le déchaînement sans frein de la violence. Ce sont des animaux consacrés à Poséidon, dieu des océans et des tempêtes, à Dionysos, dieu de la virilité féconde. Bête altière, dit Hésiode, à la fougue indomptable. C’est la forme d’un taureau d’une blancheur éclatante que prend Zeus pour séduire Europe ; il s’approche calmement de la jeune fille et se couche à ses pieds ; elle caresse l’animal et s’assied sur son dos ; aussitôt, elle est emportée, l’animal s’élance vers le ciel, traverse la mer, la dépose en Crète, où ils s’unissent ; et la légende ajoute qu’ils eurent trois enfants.

Le taureau, ou plus généralement le bovin, représente les dieux célestes dans les religions indo-méditerranéennes, en raison de la fécondité infatigable et anarchique d’Ouranos, dieu du ciel, analogue à la sienne. Le dieu védique Indra est aussi assimilé à un taureau ; les dieux qui lui correspondent en Iran et au Proche-Orient sont comparés en outre aux béliers et aux boucs. Ce sont autant de symboles de l’esprit mâle et combatif, des puissances élémentaires du sang. Les hymnes védiques célèbrent la vache, entendue ici au sens symbolique général de bovin, comme une divinité:

... La Vache a dansé sur l’océan céleste en nous apportant les vers et les mélodies
... La Vache a pour arme le sacrifice et du sacrifice est issue l’intelligence
... La Vache c’est tout ce qui est, Dieu et hommes, Asuras, Mânes et Prophètes.
... en Elle réside l’Ordre divin, la Sainteté, l’Ardeur cosmique.
Oui la Vache fait vivre les Dieux, la Vache fait vivre les hommes.

Assimilée à l’Ardeur cosmique, elle est la chaleur qui anime tout vivant. Le taureau Indra est la force chaleureuse et fertilisante. Il se rattache au complexe symbolique de la fertilité: corne, ciel, eau, Foudre , pluie, etc. Autran note que, en Acadien, rompre la corne, c’est briser la puissance. Mais, sans être brisée, cette puissance peut se sublimer. Si le taureau est l’emblème d’Indra, il est aussi celui de Civa. Comme tel, il est blanc, noble, sa bosse évoque la montagne neigeuse. Il figure l’énergie sexuelle: mais, chevaucher le taureau comme le fait Civa, c’est dominer et transmuer cette énergie, en vue de son utilisation yoguique et spiritualisante. La taureau de Civa, Nandî, symbolise la justice et la force. Il symbolise le Dharma, l’ordre cosmique: on le dit, pour cette raison, insondable.

Le taureau védique, Vrishabha, est aussi le support du monde manifesté, celui qui, du centre immobile, met en mouvement la roue cosmique. En vertu de cette analogie, la légende bouddhique revendiquera pour son héros la place du taureau du Véda. Le taureau, est-il dit, retire un de ses sabots de la terre à la fin de chacun des quatre âges : lorsqu’il les aura tous retirés, les assises du monde seront détruites. Le même rôle est attribué chez les Sioux au bison primordial. Chez les peuples altaïques et dans les traditions islamiques, le taureau appartient aussi au cycle des symboles support de la création, les cosmophores, comme la tortue. Il est parfois placé parmi les supports superposés ; de bas en haut: tortue supportant un rocher, rocher supportant un taureau, taureau supportant la terre, etc. D’autres intermédiaires se glissent entre ces degrés. Dans d’autres civilisations, d’autres animaux, comme les éléphants, jouent le même rôle. Dans le Temple de Salomon (1 Rois, 7, 25), douze taureaux portent la mer de bronze, destinée à contenir l’eau lustrale: trois regardaient le Nord, trois regardaient l’Ouest, trois regardaient le Sud et trois regardaient l’Est ; la Mer s’élevaient au-dessus d’eux et tous leurs arrière-trains étaient tournés vers l’intérieur.

Incarnation des forces chtoniennes, le taureau, pour de nombreux peuples turcotatars, supporte le poids de la terre, sur son dos ou sur ses cornes.

Le symbolisme du taureau est également lié à celui de l’orage, de la pluie et de la lune.

Le taureau et la foudre ont été de bonne heure (2400 av. J.C.) les symboles conjugués des divinités atmosphèriques. Le beuglement du taureau a été assimilé, dans les cultures archaïques, à l’ouragan et au tonnerre (le rhombe ou le Bull-Roarer chez les Australiens) ; or l’un et l’autre étaient une épiphanie de la force fécondante.

L’ensemble foudre-orage-pluie a été parfois considéré, par exemple chez les Esquimaux, chez les Boschimans et au Pérou, comme une hiérophanie de lune. (tenant Menghin établit un rapport entre le croissant de lune et les figures féminines de l’aurignacien une corne à la main) ; les idoles de type bovidé, qui se trouvent toujours en rapport avec le culte de la Grande Mère (Lune), sont fréquentes au Néolithique... Il ressort de l’étude comparée de l’art pariétal aux derniers étages du paléolithique (Aurignacien et Magdalénien) poursuivie par André Leroi-Gourhan qu’un ordre de préséance invariable préside à la disposition des figures animales, tant à Lascaux ou Altamira que dans les grottes peintes de Russie ou du Caucase ; et que la place centrale, dans cet agencement, est toujours occupée par le binaire cheval-taureau ou cheval-bison. On peut imaginer l’ampleur des voies nouvelles qu’ouvre cette observation à l’étude de la pensée symbolique et de son rôle de la genèse de l’humanité.

Les divinités lunaires méditerranéo-orientale étaient représentées sous la forme d’un taureau et investies des attributs taurins. C’est ainsi que... le dieu de la lune d’Ur était qualifié de puissant, jeune taureau du ciel ou le puissant, le jeune taureau aux cornes robustes. En Egypte la divinité de la lune était le taureau des Etoiles. Osiris, dieu lunaire, fut représenté par un taureau. Sin, dieu lunaire de Mésopotamie, avait aussi la forme d’un taureau. Vénus a son domicile nocturne dans le signe du Taureau et la Lune y est en exaltation. En Perse, la lune était Gaocithra conservateur de la semence du taureau car, d’après l’ancien mythe, le taureau primordial déposa sa semence dans l’astre des nuits.

En Asie centrale et en sibérie, parmi les Mongols et les Yakoutes, se rencontre la croyance en un taureau aquatique, caché au fond des lacs, et qui mugit avant l’orage.

Le taureau est donc généralement considéré comme un animal lunaire, mis en relation avec la nuit. La corne parfaite de Civa est le croissant lunaire. Cette assimilation, très ancienne, est attestée en Egypte et en Babylonie. Toutefois le taureau est aussi attribué à Mithra, divinité solaire, où il symbolise le dieu mort et ressuscité ; mais il garde ici l’aspect de la mort.

En Hébreu, la première lettre de l’alphabet, alef, qui signifie taureau, est le symbole de la lune à sa première semaine et tout à la fois le nom du signe zodiacal où commence la série des maisons lunaires Beaucoup de lettres, de hiéroglyphes, de signes sont en rapport simultané avec les phases de la lune et avec les cornes du taureau, souvent comparées au croissant de lune.

Un culte d’Asie mineure, introduit en Italie au II ième siècle de notre ère, enrichit le culte
métroaque de Cybèle, d’une pratique jusqu’alors inconnue à Rome : le taurobole. C’était une initiation par un baptême de sang. Le dévot qui voulait en bénéficier, écrit Jean Beaujeu, descendait dans une fosse spécialement creusée à cet effet et recouverte d’un plafond percé de trous ; puis on égorgeait au-dessus de lui, au moyen d’un épieu sacré, un taureau, dont le sang fumant ruisselait à travers les ouvertures sur tout son corps ; celui qui se soumettait à cette aspersion sanglante était renatus in aeternum, né à une nouvelle vie pour l’éternité ; l’énergie vitale de l’animal, réputé le plus vigoureux avec le lion, régénérait le corps et, peut-être, l’âme de l’officiant. Le sang du taureau ruisselant sur le myste était censé communiquer à celui-ci, par un double symbole, la puissance biologique du taureau et surtout l’accession, sous sa forme la plus haute, à la vie spirituelle et immortelle.

Le culte de Mithra, d’origine iranienne, comportait également un sacrifice du taureau, de signification analogue, mais dans un décor rituel et doctrinal quelque peu différent. Les armées romaines avaient répandu dans tout l’empire le culte de Mithra, dieu Sauveur, Vainqueur invincible, né d’un rocher, un 25 décembre, après le solstice d’hiver, quand les jours recommencent à grandir, jour où l’on célébrait la renaissance du Soleil, Natalis Solis... L’acte essentiel de la vie de Mithra avait été le sacrifice du taureau primitif, le premier être vivant créé par AhuraMazda ; après l’avoir dompté et emmené dans son antre, Mithra, sur l’ordre du Soleil, l’égorgea ; de son sang, de sa moelle et de ses germes naquirent les végétaux et les animaux, malgré les efforts du serpent et du scorpion, agents d’Ahriman. L’ascension de Mithra et l’immolation du taureau ornent une foule de monuments mithriaques ; les deux scènes, explique Jean Beaujeu, symbolisent la lutte des puissances du bien contre les esprits du mal, lutte à laquelle tous les fidèles doivent constamment participer de toutes leurs forces, et l’accès au séjour de la lumière éternelle garanti aux âmes des justes par l’intercession toute-puissante de Mithra.

C’est peut-être appliquer une règle d’interprétation trop peu spécifique que de voir avec Krappe dans le sacrifice mithriaque du taureau la pénétration du principe mâle dans le principe femelle, du feu dans l’humide, du soleil dans la lune et d’expliquer par là le symbolisme de la fécondité. C’est moins d’ailleurs ce symbolisme qui ressort du culte de Mithra que ceux de l’alternance cyclique de la mort et de la résurrection, ainsi que de l’unité permanente du principe de vie.

La mort est inséparable de la vie et le taureau présente aussi une face funèbre. Chez les Egyptiens, le taureau qui porte entre les cornes un disque solaire est à la fois un symbole de fécondité et une divinité funéraire liée à Osiris et à ses renaissances: ses obsèques sont célébrées à Memphis avec un grand faste, on apporte des dons de tous les points d’Egypte, mais à peine disparu, Apis renaît dans une autre enveloppe mortelle et on le reconnaît, au milieu des troupeaux, à la tache noire au front, au cou et sur le dos de son pelage blanc.

Pour les Tatars de l’Altaï le maître des enfers est représenté tantôt dans une barque noire sans rames, tantôt monté à l’envers sur un taureau noir. Il tient à la main un serpent ou une hache en forme de lune. On lui sacrifie des taureaux ou des vaches noirs.

Dans presque toute l’Asie, le taureau noir est rattaché à la mort. En Inde, en Indonésie, une coutume existe de brûler les corps des princes dans des cercueils en forme de taureau. En Egytpe, des peintures représentent un taureau noir portant sur son dos le cadavre d’Osiris.

Le taureau ne semble pas avoir eu, pour les Celtes, une valeur symbolique exclusive de virilité et il n’est pas certain que sa signification première soit à rechercher dans la dualité ou dans l’opposition sexuelle avec la vache. Le taureau est en effet, en Irlande, l’object de métaphores surtout guérrières. Un héros ou un roi de grande valeur militaire est souvent appelé le taureau du combat. D’autre part, le taureau est la victime de ce qu’on appelle en Irlande le festin du taureau, première partie du rituel de l’élection royale, telle que la raconte le texte de la Maladie de Cuchulainn. On sacrifie l’animal, un poète mange de la viande, boit du bouillon à satiété, s’endort et, dans son rêve, voit le candidat-roi qui doit être choisi par l’assemblée des nobles. La seconde partie du rituel (qui concerne le roi élu) a pour victime le cheval. Le taureau forme donc un couple antithétique avec le cheval, mais il est tout aussi guerrier que lui et le sacrifice des taureaux blancs raconté par Pline à propos de la cueillette du gui est un ancien rituel royal, ayant perdu toute raison d’être par suite de la conquête romaine et de la disparition de toute vie politique indépendante. Car le taureau est, comme le cheval, un animal royal: Deiotaros, taureau divin. Des tétrarques galates ont porté ce nom parce qu’ils étaient rois, et non parce qu’ils étaient prêtres, comme on l’a quelquefois supposé à tort. Cette connotation renvoie directement au binaire cheval-taureau de l’art paléolithique signalé plus haut.

Le taureau est bien un animal primordial. Dans le récit de la Razzia des Vaches de Cooley, où un taureau brun et un taureau blanc se combattent à mort, l’un représente l’Ulster et l’autre le Connaught: les posséder signifie posséder la souveraineté guerrière, d’autant plus que l’un et l’autre ont la voix et l’intelligence humaines. Ils sont nés de la métamorphose des deux porchers des rois du Sud et du Nord de l’Irlande et ils ont passé par divers états animaux. En Gaule, l’iconographie comporte un taureau aux trois grues (équivalents probable des cygnes insulaires) et un taureau à trois cornes, lequel est probablement un ancien symbole guerrier incompris à l’époque gallo-romaine: la troisième corne doit représenter ce qu’en Irlande on appelle le lon laith ou lune du héros, espèce d’aura sanglante qui jaillit du sommet du crâne du héros en état d’excitation guerrière. On peut noter en annexe que le nom de bison a survécu dans le toponyme de Vesontio, ancien nom de Besançon.

Toutes les ambivalences, toutes les ambiguïtés existent dans le taureau. Eau et feu: il est lunaire, en tant qu’il s’associe aux rites de la fécondité ; solaire, par le feu de son sang et le rayonnement de sa semence. Sur la tombe royale d’Ur se dresse un taureau à tête d’or (soleil et feu) et à la mâchoire de lapis-lazuli (lune et eau). Il est ouranien et chthonien. Les bovidés, comme les canins, peuvent apparaître en effet tantôt comme des épiphanies terrestres ou chthoniennes, tantôt comme des épiphanies ouraniennes. C’est souvent à leur couleur que leur symbole se précise. Ainsi le boeuf-cendre se présente-il comme une épiphanie de la terre-femelle, en face du cheval blanc, incarnant la force céleste mâle, dans la représentation du couple Terre-Ciel que se font certains peuples altaïques.

En Chine, si la tête cornue de Chennong, inventeur de l’agriculture, peut évoquer boeuf ou taureau, celle de Tch’e-yeou est manifestement assimilable au taureau. Encore Houang-ti s’opposait-il à l’un et à l’autre. Le taureau est un génie du vent. Tch’e-yeou, tête cornue et pieds bovins, s’oppose, grâce au vent (et à la pluie) à Houang-ti, qui le fait combattre par des dragons aquatiques, mais aussi par la sécheresse. Tch’e-yeou est fauteur de désordres cosmiques. Il sera vaincu par Houang-ti, dont l’emblème est le hibou.

Le boeuf, antithèse symbolique du taureau, fait ressortir cette complexité, car il est associé lui aussi aux cultes agraires. Mais il symbolisera le sacrifice de la puissance fécondante du taureau, faisant mieux ressortir par contraste l’unicité de celle-ci. La suppression de ce pouvoir en rehausse la valeur, de même que la chasteté souligne l’importance de la sexualité. Le principe actif ouranien manifeste sa violence, en s’affirmant ou en se niant d’une façon également absolue. Libre, il féconde ; retenu, continent, il marque avec une égale netteté que, sans lui, aucune fécondité, du moins dans le même ordre et au même niveau d’existence n’est possible ; c’est la contre-épreuve d’une même vérité. La sublimation de l’énergie vitale acquiert une fécondité d’un autre ordre, celui de la vie spirituelle.

Dans la symbolique analytique de Jung, le sacrifice du taureau représente le désir d’une vie de l’esprit qui permettrait à l’homme de triompher de ses passions animales primitives et qui, après une cérémonie d’initiation, lui donnerait la paix. Le taureau est la force incontrôlée sur laquelle une personne évoluée tend à exercer sa maîtrise. L’engouement pour les corridas s’expliquerait peut-être, aux yeux de certains analystes, par ce désir secret et inavoué de tuer la bête intérieure ; mais il se produirait comme une substitution et la bête sacrifiée à l’extérieur dispenserait du sacrifice intérieur ou donnerait l’illusion, par la médiation du toréador, d’une victoire personnelle.

Certains analystes ont vu aussi dans le taureau l’image du père déchaîné, à l’exemple d’Ouranos, que son fils Cronos se détermina à châtrer. Autre forme du complexe d’OEdipe: tuer le taureau, c’est supprimer le père.

Selon l’interprétation éthico-biologique de Paul Diel, les taureaux symbolisent avec leur force brutale la domination perverse. Leur souffle est la flamme dévastatrice. L’attribut d’airain ajouté au symbole pied est une image fréquente dans la mythologie grecque qui sert à caractériser l’état d’âme. Attribués aux taureaux, les pieds d’airain symbolisent le trait marquant de la tendance dominatrice, la férocité et l’endurcissement de l’âme.

Héphaïstos avait forgé deux taureaux vigoureux et violents, aux sabots d’airain, soufflant le feu par les naseaux, apparemment indomptables . Jason devait sans aucune aide leur imposer le joug pour pouvoir conquérir la toison d’or ; cette condition signifiait que le héros devait avoir dompté la fougue de ses passions, avant de s’emparer de ce symbole de la perfection spirituelle, c’est-à-dire qu’il devait avoir sublimé ses désirs instinctifs.

Texte 2

Dans les cavernes du paléolithique, les grands taureaux sauvages (bisons et aurochs) peints à proximité de chevaux constituaient le motif le plus généralement représenté. Il s’agissait là d’un couple d’opposés, puisque d’après les interprétations récentes des historiens, ce qui était ainsi mis en jeu, c’était la polarité sexuelle, psychique et religieuse du féminin (taureau) et du masculin (cheval). Cette conception peut nous étonner aujourd’hui, mais il faut sans doute bien voir que la puissance génésique de cet animal n’était envisagée que dans sa valeur maternelle, à une époque où, apparemment, l’homme n’avait pas encore découvert son rôle et sa fonction dans le processus de reproduction. On peut aussi penser que le taureau, par sa puissance et sa stature massive, évoquait, de la même façon, l’aspect redoutable de la nature qu’on ne savait pas encore dominer. Il est d’ailleurs remarquable qu’au néolithique, au moment où apparaissent l’agriculture et l’élevage, le taureau soit toujours associé à la figure de la déesse-mère alors prégnante, que ce soit en Turquie (à çatal Hüyuk), ou au Proche-Orient, en Mésopotamie, particulièrement dans la région de Mureybet. Le taureau paraît avoir alors symbolisé , soit le versant masculin de la Déesse considérée comme androgyne (ce que Jung appelerait son animus, ou ce que la psychanalyse freudienne désigne comme “ Mère au pénis ”, renvoyant à la “ scène originaire ” telle qu’elle a ensuite été décrite et étudiée par Mélanie Klein), soit ce versant autonomisé qui accède alors à la dignité de compagnon et de parèdre de la Mère. La représentation de ses cornes, ou bucrane, joue alors un grand rôle, d’autant qu’elles rappellent un croissant de lune, ou servent de berceau à cet astre. On retrouve d’ailleurs la même thématique jusque dans l’Inde la plus ancienne, et singulièrement dans la culture de Mohenjo Daro où le culte du taureau semble avoir été en liaison avec des collèges de prêtresses et de danseuses. Ce n’est que plus tard que le taureau est devenu un dieu à part entière, généralement lié aux orages et aux tempêtes, incarnant les forces dynamiques de la fécondité et de la nature. Il reste alors cependant en relation étroite avec la figure de la femme à qui il obéit ou dont il occupe la place d’amant divint. C’est ainsi qu’Ishtar, lorsqu’elle veut se venger de Gilgamesh qui a refusé ses avances, demande au dieu-taureau d’envoyer un “ taureau du ciel ” sur terre afin de laver cet affront: “ Anu envoya un taureau du ciel / à Uruk.../ à son premier éternuement, il tue/ trois cents guerriers... ” - Cette conception de taureau céleste sera confortée par l’arrivée des Indo-Européens au panthéon presque exclusivement ouranien, mais elle s’était déjà largment répandue au cours des millénaires à travers tout l’Orient. Lorsque Ménès, le premier pharaon “ historique ”, unifie la Basse et la Haute-Egypte, il le fait en partie sur la base du culte du taureau Hap, ou Apis, indentifiant dès lors les cultes taurin et royal dans une synthèse qui va traverser les siècles. Bien des siècles plus tard, sous la XVIIIe dynastie, lorsque Toutmosis Ier publie son édit de couronnement il déclare ainsi: “ Mes titres seront les suivants: “ Taureau puissant qui s’élève comme une flamme, le plus vaillant de tous,... le dispensateur de vie . ” Le culte du taureau devint alors assez prégnant pour que, avant de succomber souvent aux cultes païens de Canaan (Baal et Anat ou Astarté), les Hébreux, quittant l’Egypte, et en l’absence de Moïse, sacrifient à un culte du Veau d’or. Les écrits apocalyptiques bien postérieurs en portent d’ailleurs encore la marque, comme le Livre de Hénoch (Iie siècle av. J.C.), où Hénoch, le père de Mathusalem, décrit ainsi à son fils la vision qu’il a eue de la création d’Adam et Eve, puis de l’engendrement de leurs enfants: “ D’Adam, il dit: Et Vois, une vache jaillit de la terre, et cette vache était blanche. D’Eve: Ensuite jaillit une génisse. De Caïn et d’Abel: La génisse noire frappa la génisse rouge et la poursuivit sur la terre. De Noé et de ses fils: Puis la vache blanche, qui devint un homme, sortit du bateau et les trois vaches avec lui... ” Ici, on le voit, l’humanité est à la fois l’épouse et la fille du Seigneur suprême, sous les traits d’un taureau divin. - Cette même figure est très répandue en Grèce, où Zeus se métamorphose souvent dans cet animal afin d’enlever les mortelles qu’il convoite (Europe, Io qu’il transforme en vache, etc. ). Neptune y était aussi un taureau marin qui, comme tel, se rattache particulièrement à l’ancienne religion où l’on trouve la relation entre la déesse et le taureau. Des “ Corne de consécration ” surmontaient le palais de Cnossos, tandis que le roi légendaire de Crète, Minos, était tenu pour le fils de Zeus-taureau et d’Europe. C’est pourtant au taureau marin de Neptune que se donne sa femme, Pasiphaé, comme si ce taureau issu des vagues, c’est-à-dire à la fois des profondeurs de l’inconscient et d’un royaume en définitive à connotation maternelle, était - psychiquement et religieusement - plus légitime. On est ainsi renvoyé vers les plus antiques scénarios de souveraineté où le roi-taureau devait s’accoupler avec le principe féminin (voir aussi Prostituée). Dans une puissante synthèse religieuse, le taureau en vint à être rattaché en même temps aux idées primordiales de fertilité, puis de mort et de renaissance. C’est à de telles conceptions que renvoient les tauroboles, ou sacrifices de taureaux, qui trouvent leur dernière expression et leur signification spirituelle profonde dans la religion de Mithra, tandis qu’en Inde le taureau, emblème du dieu Indra, est surtout et d’abord la monture de Shiva. Comme ce dernier est d’essence lunaire par rapport au Vishnou solaire, son taureau est affecté de la même connotation, et ses cornes équivalent aux Croissants de cet astre. Répondant au nom de Nandi, il symbolise l’ordre cosmique sur lequel règne son maître. Assez proche de cette signification, le taureau des Védas, Vrishabha, est celui qui supporte la création et qui la met en mouvement comme s’il se tenait au milieu de la roue cosmique. - Chez les Celtes, on retrouve en revanche, au moins pour partie, l’opposition entre le taureau et le cheval. Dans la Maladie de Cuchulainn, en effet, l’un des épisodes principaux de la Tain Bô Cualgné (ce que l’on traduit généralement en français par la “ Razzia des vaches de Cooley ” - ce qui montre bien assez que l’opposition majeure n’est pas celle du taureau et de la vache), un rite d’investiture royale nous fait assister consécutivement au sacrifice d’un taureau, puis à celui d’un cheval, chacun ayant une signification particulière. Le taureau retrouve d’ailleurs là, d’une façon déguisée, sa relation avec le féminin et le maternel, puisqu’il est signe de souveraineté (placée en Irlande sous les auspices de la Déesse), et qu’il correspond à la caste guerrière en tant que celle-ci obéit au roi (voir aussi ours) comme “ chef militaire passif ”, reflet en cela de la même déesse souveraine (Morrigane, Bodb et Macha) qui inspire les armées et préside aux batailles. C’est là le motif même de “ La Razzia des vaches de Cooley ” où la guerre qui oppose le Connaught à l’Ulster porte sur la possession d’un taureau brun et d’un taureau blanc qui symbolisent chacun l’une de ces provinces. Il faut noter que cette guerre est déclenchée par la volonté de la reine Medb du Connaught (voir Maeve), qui est elle-même une figure de la souveraineté royale. - La corrida Espagnole, ou course de taureaux, ne peut sans doute être vraiment comprise que dans cette perspective qui lui donne alors tout son sens. En effet, renouant, par-delà les siècles, avec les jeux taurins de la Crète antique où, dans le courant du culte, des gymnastes accomplissaient des sauts et des danses avec l’animal sacré, elle représente d’abord une forme ritualisée d’affrontement avec le symbole même de la nature brute, renvoyant aussi bien à la virilité exacerbée du taureau qu’à la place mythologique qu’il occupait auprès de la vieille déessemère. Comme l’écrit un chroniqueur espagnol: “ L’Andalousie sacrifie encore, de la sorte, à la figure de la Mère antique, en même temps qu’elle l’exorcise de ses peurs ancestrales. Ces rites du sang et de la mort sont l’expression artistique de la condition de l’homme, où il cherche à échapper à son destin en l’accomplissant jusqu’au bout ”. Dans la symbolique astrologique (voir Etoile), le taureau est le second signe du zodiaque et représente un “ signe de terre ” ; les personnes nées sous ce signe sont marquées par la lourdeur, l’attachement à la terre, la stabilité et la vitalité. Le signe se situe entre le 21 avril et le 21 mai et Vénus y a “ sa maison nocturne ”, ce qui rappelle les relations qu’entretenait, dans la mythologie classique, le dieu-taureau avec la déesse de l’Amour. Les légendes astrologiques grecques voient, dans le taureau céleste, le Minotaure, fils de Pasiphaé et du taureau de Neptune, mais aussi ce boeuf sauvage qui ravagea jadis les champs de Marathon et qui fut tué par Thésée. Sur le dos de l’animal céleste se trouve l’amas nébuleux des Pléïades, les sept filles d’Atlas poursuivies par le chasseur Orion (voir Scorpion) avant qu’elles ne soient métamorphosées en colombes puis en étoiles. L’oeil clair du taureau céleste est l’étoile fixe Aldébaran.

Religion

En Gaule, comme dans les autres pays celtiques, le taureau était sacré, autant et peut-être plus que le cerf. Le nom de cet animal s’est maintenu dans quelques noms de tribus ; chez les Ibéro-Celtes, il y a un pays de Tauria, en Gaule Cisalpine habitaient les Taurini, sur les bords de la Save les Taurisci. Cette racine se retrouve également dans des noms géographiques ; il y a même 46 Tauriacus ; citons Tarva (l’actuelle Tarbes), et Tarvanna (aujourd’hui Thérouanne) ; en Angleterre, il y a Tarvedum et Tarodunum. De même pour les cours d’eau : en Ecosse, par exemple, le fleuve Tarf. Le mot bo (“ vache ”) entre également dans les noms de fleuves irlandais ; la Boyne (de bo-vinda) s’appelle littéralement “ la vache blanche ”. Bien entendu, ce mot se retrouve dans des noms propres, par exemple Brogitarus (taureau du pays), Deiotarus (taureau divin) et Donnotaurus, dans le premier membre duquel on croit reconnaître dom-no-s (juge, noble).
Il faut rappeler aussi les légendes du cycle de l’Ulster, en particulier la Tain bo Cualnge. Toute l’histoire porte sur la lutte pour la possession du taureau Donn ; on traduit habituellement ce mot “ le brun-sombre ”. A la fin de la Saga, on raconte un violent combat entre les taureaux du Munster et de l’Ulster, dans lequel Donn est vainqueur. Le boeuf est si important qu’en parlant des Irlandais, Weisweiler a dit qu’ils “ pensaient en termes de bovidité (qui rappelle aussi qu’en Irlande, la vache était la principale source de nourriture ”.
Il y a aussi en Gaule des taureaux d’un genre tout particulier. En premier lieu, le taureau à trois cornes. Dans 36 cas environ, il est utilisé comme talisman ; citons aussi un beau bronze de Martigny-en-Valais et surtout le taureau d’Avrigney (Haute-Saône). Un petit ex-voto trouvé à Maiden Castle, près de Dorchester, est curieux parce que trois demi-personnages ont été placés sur le dos du taureau ; c’est, à n’en pas douter, un excellent exemple de l’importance du nombre trois.
Ce taureau tricorne est souvent joint à d’autres motifs religieux, sans que l’on voie bien où est le rapport. Il apparaît même en compagnie de différents dieux : Apollon (Beire-le-Châtel), Mars (Madrid) ou un buste de femme (Moulins). Il est également représenté avec d’autres animaux : un sanglier (“ Bronze Caylus ”), un cerf (Sainte), un bélier (Moulins) enfin un oiseau (Skierne, Danemark). L’ex-voto de Maiden Castle présente en outre une spirale en S. Rien de tout cela ne nous renseigne sur sa signification ; comme si souvent en Gaule, symboles et attributs passent d’un dieu à l’autre assez arbitrairement.
Il est naturellement exclu que la troisième corne soit un simple élément technique artistique. Nous avons si souvent rencontré le nombre trois que nous ne pouvons douter qu’il ait, ici aussi, une signification religieuse. En elle-même, la corne est certainement le symbole de la violence du taureau ; triple corne exalte donc cette force, et peut-être aussi sa combativité. Je serais tenté de croire que c’est surtout l’habitude qu’à le taureau de charger avec impétuosité, qui a inspiré des représentations de ce genre.
Sur le célèbre autel de Paris, dont nous avons parlé à propos d’Esus, se trouve un magnifique taureau, qui orne l’un des côtés. Deux grues sont perchées sur son dos, et une troisième sur sa tête. L’inscription suscrite dit : Tarvos Trigaranvs. Derrière le taureau, un arbre étale ses branches. Que signifie tout cela ?
Le taureau figure aussi sur un autel trouvé à Trèves ; il y est directement rattaché à Esus, qui porte un manteau court et abat un arbre, sans doute en saule, dans les branches duquel on voit deux grues et une tête de taureau.
Le taureau est-il une divinité ? On en a douté, car sur l’autel de Paris, il a une couverture sur le dos, ce qui semble vouloir dire qu’on va le sacrifier. Serait-il alors l’animal qu’on va offrir aux trois dieux représentés sur le monument (Mercure, Esus et Rosemerta) ? L’autel de Trèves confirmerait cette interprétation dans une certaine mesure, car on n’y voit que la tête d’un taureau.
Mais si le taureau n’était destiné qu’au sacrifice, pourquoi avoir indiqué son nom ? “ Tarvos Trigaravs ”, c’est précisément “ le taureau aux trois grues ”. La présence de ces oiseaux rend fort peu vraisemblable que l’animal soit simplement là pour être sacrifié.
Mais le sens de ces grues est très obscur. Tellement même, que l’on a cru devoir corriger l’adjectif. On a pensé à une déformation de trikaranos ou trikeratos, qui indiqueraient un taureau tricéphale ou tricorne. J’objecterai que cette modification serait très étrange, et que son contraire serait plus plausible. En effet, un taureau à trois cornes est chose très courante en Gaule, ainsi que les êtres tricéphales. On voit mal pourquoi on l’aurait remplacé par un mot aussi bizarre que trigaranus en associant, par conséquent, trois grues au taureau. L’important est justement que le taureau n’a ni trois têtes, ni trois cornes. Il va de soi que nous devons nous débrouiller avec le mot trigaranus.
J. Vendryes a montré avec une grande perspicacité que quelques vers d’une comédie perdue de Philémon (mort en 262 av. J.-C.), qui sont cités par Athénée, jettent peut-être quelque lumière sur ce mot. Il y est question du roi Séleucus Nikator, qui avait envoyé un tigre en Grèce ; nous devrions, dit Philémon, lui envoyer en retour le therion trugeranon. Vendryes se demande si cela ne pourrait pas désigner une pièce de butin prise dans un camp celte ; en ce cas, on aurait sur les bords de la Mer Egée un pendant de l’autel de Paris.
Mais ce n’est là évidemment qu’une ingénieuse hypothèse. Quoi qu’il en soit, il faut tenter de voir en quoi ce taureau à trois grues est un symbole religieux ; l’image qui orne l’autel trouvé sous Notre-Dame prouve qu’il est très important. Il faut donc savoir d’abord ce qu’il en est des grues. On attribuait effectivement dans l’antiquité des particularités remarquables à cet oiseau. La célèbre légende d’Ibykos en est un exemple frappant. On les adorait comme conductrices des voyageurs, surtout des marins. Les Slaves croient communément que les âmes des morts se rendent dans les îles de la béatitude en s’accrochant aux pattes ou aux plumes de grues. N’oublions pas non plus la danse du geranos, dans la légende de Thésée ;quel que soit le rôle que les grues ont pu y jouer, la danse elle-même imite le labyrinthe, qui mène au royaume des morts. Mais au centre du labyrinthe se trouve un taureau merveilleux : le Minotaure. Le fait que la sortie du labyrinthe ait été fêtée par la danse des grues doit nous garder de ne voir dans l’image de l’autel de Paris qu’une fantaisie, ou la transcription d’un jeu de mots. Czarnowski a fait une ingénieuse hypothèse : la grue et le taureau auraient joué un rôle dans un drame mythique : le mythe de la conquête de l’île des bienheureux. Il fait, en s’appuyant sur la légende des Hespérides, de l’arbre qui orne l’autel de Notre-Dame, un arbre de vie. Le taureau aux trois grues, et aussi celui aux trois cornes, serait l’être triple des Iles des Hespérides. V. aussi MAUGARD, Ogam, XI, 1959, pp. 427-433, qui pense au taureau cosmique et à l’arbre cosmique, et dit des grues : “ l’oiseau exprime l’idée de transcendance par-delà la kratophanie ”.
Avec le Minotaure, nous sommes chez les Egéens. Crète est connue non seulement par la légende de Thésée, mais aussi par la décoration du palais de Knossos, qui comporte beaucoup de jeux faisant intervenir des taureaux. On ne peut s’empêcher de penser aux combats de taureaux qui ont été organisés en Espagne de tout temps, et on est tenté de croire qu’ils se rattachent directement à la bataille des deux taureaux dans la Tain bo Cualnge.
Dans tout le bassin de la Méditerranée, le culte du boeuf joue un rôle notable. Le nom des Itali signifie “ veaux ”. Dans la légende grecque d’Europe, Zeus prend l’aspect d’un taureau ; Héra, par contre, est nettement liée à la vache. Le taureau est un symbole divin aussi bien chez les Hittites qu’en Syrie (Hadad). Le boeuf (en réalité : taureau) Apis d’Egypte pourrait s’ajouter à cette liste.
Ainsi, le culte gaulois du taureau n’est pas un phénomène isolé ; au contraire, ce n’est que le dernier prolongement d’une conception religieuse enracinée dans tout l’Orient méditerranéen et qui peut être mise en évidence jusqu’à une haute antiquité. Le lien établi, non seulement par les monuments gaulois, mais aussi par la légende du Minotaure, entre le taureau et les grues me semble assez important pour qu’on se pose la question de son sens originel. Il n’est naturellement pas exclu qu’au cours de l’histoire de ce symbole composé, cette signification se soit modifiée.
Il faut déterminer le sens particulier du taureau à partir des idées gauloises. Sa fécondité, sa charpente massive, sa vigueur et son impétuosité, ainsi que son mugissement puissant, devaient faire de lui un symbole. Les dieux du tonnerre Hadad et Teschub sont debout sur un taureau. “ Cela peut aboutir à un culte, dit L. Malten, “ au culte du dieu-taureau, de sorte que l’animal devient la manifestation et le siège de forces divines. ” Il n’est donc pas nécessaire de dire qu’un dieu à forme humaine est venu, par suite d’une “ évolution ”, d’une divinité qui, à un “ stade primitif ”, était un taureau.
Malten note aussi avec raison : “ Le taureau et son sacrifice appartiennent à une pensée agraire ”. Peut-être pourrait-on ajouter : ils remontent à la civilisation des pasteurs nomades. A travers tous les changements de civilisations, le taureau demeura objet de culte, bien que son sens variât. C’est ainsi qu’il peut avoir des rapports étroits avec le ciel, le soleil et la pluie (et sans doute est-là un héritage du nomadisme) ; plus tard, en Orient surtout, il dispensa la prospérité et la maturation.
C’est avouer que l’on ne peut dire exactement pour quelles raisons le taureau était adoré en Gaule. Il a pu entrer dans toutes sortes de combinaisons secondaires. Quand Deonna dit que le taureau est un animal céleste (solaire d’une part, lunaire d’autre part), mais en relation également avec les eaux et symbolisant enfin, par exemple sur l’autel de Reims, l’abondance, cette diversité montre combien le symbolisme du taureau est fuyant. Comme tous les symboles, celui du taureau est polyvalent. Pourtant, à l’arrière-plan des différents aspects, doit se trouver le respect de la force dont cet animal déborde.

Boeuf

Texte 1

Contrairement au taureau, le boeuf est un symbole de bonté, de calme, de force paisible ; de puissance du travail et du sacrifice, écrit Devoucoux à propos du boeuf de la vision d’Ezéchiel et de l’Apocalypse. Encore ce boeuf peut-il être en fait un taureau. Ce sont certains aspects symboliques et leurs interprétations qui les distinguent. La tête de boeuf de l’empereur Chenong, inventeur de l’agriculture, celle de Tche-yeou paraissent être aussi bien des têtes de taureau (le même caractère niu désigne l’un et l’autre animal). Le boeuf Apis de Memphis, hypostase de Ptah et d’Osiris, n’est-il pas lui-même un taureau ? Le même mot désignait tous les bovidés. Son caractère lunaire n’est pas déterminant à cet égard.

Le boeuf, et plus encore le buffle, auxiliaires précieux de l’homme, sont respectés dans toute l’Asie orientale. Ils servent de monture aus sages, particulièrement à Lao-tseu dans son voyage vers les marches de l’ouest. Il y a en effet, dans l’attitude de ces animaux, un aspect de douceur et de détachement, qui évoque la contemplation. Les boeufs statufiés sont fréquents dans les temples de Shintô. Mais dans la Chine ancienne, un boeuf de terre figurait le froid, qu’on expulsait au printemps, en vue de favoriser le renouveau de la nature ; c’est un emblème typiquement yin.

Le buffle est plus rustique, plus lourd, plus sauvage. L’iconographie hindoue en fait la monture et l’emblème de Yama, divinité de la mort. Au Tibet également, l’esprit de la mort possède une tête de buffle. Cependant, chez les Gelugpa - secte des Bonnets jaunes - le Bodhisattva Manjushrî, destructeur de la mort, est lui-même représenté avec une tête de buffle. Le buffle est la représentation classique de l’asura (titan) Mahesha, vaincu et décapité par Candî (aspect d’Uma ou Durgâ). Il se peut que ce buffle, qui affectionne les marécages, soit en rapport avec l’humidité et soit vaincu par le soleil ou par la sécheresse. En fait, un buffle est parfois sacrifié en Inde à la fin de la saison des pluies. Mais l’assura figure aussi, dans l’iconographie, sous forme humaine et se libérant progressivement de la forme animale décapitée ; ce qui possède une signification d’ordre spirituel.

Chez les populations montagnardes du Vietnam, pour lesquelles le sacrifice du buffle est l’acte religieux essentiel, cet animal est respecté à l’égal d’un humain. Sa mise à mort rituelle en fait l’envoyé, l’intercesseur de la communauté auprès des Esprits supérieurs.

Chez les Grecs, le boeuf est un animal sacré. Il est souvent immolé en sacrifice: l’hécatombe désigne le sacrifice de cent boeufs. Il est consacré à certains dieux: Apollon avait ses boeufs qu’Hermès lui déroba ; celui-ci ne put se faire pardonner son larcin, ce sacrilège, qu’en donnant à Apollon la lyre qu’il avait inventée, faite d’une peau et de nerfs de boeuf, tendus sur une carapace de tortue. Le Soleil a ses boeufs, d’une blancheur immaculée et aux cornes dorées ; si les compagnons d’Ulysse affamés en mangent dans l’île de Thrinacie, malgré les interdictions de leur chef, ils périssent tous ; seul Ulysse, qui s’était abstenu, échappe à la mort.

Des boeufs sacrés étaient entretenus par la famille des Bouzyges ; ils étaient destinés à commémorer le labour initial de Triptolème, lors des rites du labourages sacré qui célèbraient aux mystères d’Eleusis. Dans toute l’Afrique du Nord, encore, le boeuf est un animal sacré, offert en sacrifice, lié à tous les rites de labour et de fécondation de la terre.

En raison sans doute de ce caractère sacré, de ses relations avec la plupart des rites religieux, comme victime ou comme sacrificateur (quand il ouvre, par exemple, le sillon dans la terre) le boeuf a été aussi le symbole du prêtre. Par exemple, suivant une interprétation incertaine, les boeufs de Géryon, le géant à trois têtes, seraient les prêtres du delphisme primitif, dont Géryon est le pontife suprême ; il aurait été vaincu et tué par Héraclès ; le culte delphique aurait été ensuite renouvelé.

Le Pseudo-Denis l’Aréopagite résume en ces termes la symbolique mystique du boeuf: la figure du boeuf marque la force et la puissance, le pouvoir de creuser des sillons intellectuels pour recevoir les fécondes pluies du ciel, tandis que les cornes symbolisent la force conservatrice et invincible.

Il existe une divinité gauloise Damona, parèdre du protecteur des eaux thermales Borvo ou Apollon Borvo, et dont le nom contient le thème celtique désignant généralement les bovidés, dam. Mais le boeuf ne posséderait pas, dans le monde celtique, de symbolisme indépendant, en dehors du symbolisme chrétien usuel. Les légendes galloises témoignent cependant de l’existence de boeufs primordiaux. Les deux principaux sont ceux du Hu Gadarn, personnage mythique, qui arriva le premier dans l’île de Bretagne, avec la nation des Cymry (Gallois). Avant l’arrivée de ces derniers, il n’existait en Bretagne que des ours, des loups, des castors et des boeufs cornus. Le Lebor Gabala (Livre des Conquêtes) nomme aussi, mais sans autre indication, des boeufs mythiques. Le boeuf jouerait alors un rôle analogue à celui du héros civilisateur.

Texte 2

Le boeuf constitue, à la fois symboliquement et culturellement, le pendant domestiqué (et castré) du taureau sauvage ; il symbolise habituellement le serviteur patient et les forces pacifiques: c’est pourquoi il était autrefois une bête sacrificielle très respectée. Dans l’ancienne Chine, il passait pour immoral de consommer la viande d’un animal qui aide au labour de la terre. Dans le monde chrétien, le boeuf apparaît avec l’âne dans l’étable de Béthléem. En raison d’un passage d’un évangile apocryphe de Matthieu, il apparaît aussi comme attribut de saint Cornélien (qui arriva en Bretagne sur un char tiré par des boeufs, et qui transforma ses poursuivants en blocs de pierre), ou du patron du bétail, saint Léonard (ou Silvestre ou Wendelin). En tirant vers un endroit déterminé un véhicule chargé d’un objet sacré ou du corps d’un saint (ce qui deviendra plus tard un lieu de pèlerinage), les boeufs deviennent les exécutants d’une volonté divine, et jouent de ce fait un rôle dans de très nombreuses légendes. Les représentations de boeufs sur les chapitaux des colonnes romaines passent, sans que l’on sache très bien pourquoi, pour des symboles nocturnes. “ Qui n’a point de bétail a certes des gerbes dans la mangeoire, mais la force des boeufs procure des revenus abondants ” (Proverbes de Salomon 14, 4). - Sous la forme du buffle, le boeuf apparaît en Inde comme la monture du dieu de la mort, Yama, tandis qu’il revêt la signification contraire au Tibet où la figure du boddhisattva Manjushri, le vainqueur de la mort, porte une tête de buffle. - On a parfois parlé d’une thématique du boeuf chez les anciens Celtes mais, apparemment, tout à fait à tort. Les bovidés y sont en fait représentés, à part une brève mention du Livre des Conquêtes, sous la forme de vaches et de taureaux. (La Razzia des vaches de Cooley)

Mithra

Texte 1

Dieu des religions à mystère, ou de salut, distributeur de l’énergie vitale, souverain des armées, nommé le Dieu ou le Soleil invaincu (Sol invictus). Assimilé au dieu du Temple infini, il se trouve à l’origine de l’univers des vivants et le dirige. Il est représenté sous la forme d’un héros égorgeant un taureau, le premier vivant, dont le sang répandu donnera naissance aux végétaux et aux animaux ; ou sous la forme d’un être humain à tête de lion, dont le corps est entouré d’un serpent, figurant le cours sinueux du Soleil et du Temps. Il est né d’un rocher, un 25 décembre, jour où se célébrait, après le solstice d’hiver, la renaissance du soleil (Natalis Solis). Son culte a rivalisé avec celui du christianisme à ses débuts. Il fut introduit de la Perse à Rome, en Gaule, dans tout le bassin méditerranéen par les légions et leurs escortes de devins, à la fin de la République et aux premiers siècles de l’Empire. Ses adeptes pratiquaient le culte du taurobole, le sacrifice sanglant du taureau, pour participer aux forces attribuées au dieu et au taureau, qui les symbolisaient. Le dévot descendait dans une fosse spécialement creusée à cet effet et recouverte d’un plafond percé de trous ; puis on égorgeait au-dessus de lui, au moyen d’un épieu sacré, un taureau, dont le sang fumant ruisselait à travers les ouvertures sur tout son corps ; celui qui se soumettait à cette aspersion sanglante était renatus in aeternum (né à une nouvelle vie pour l’éternité), l’énergie vitale de l’animal, réputé le plus vigoureux avec le lion, régénérant le corps et, peut-être, l’âme de l’officiant. Le culte mithriatique symbolise la régénération physique et psychique par l’énergie du sang, puis par l’énergie solaire, enfin par l’énergie divine. Bel exemple de symboles superposés, suivant un même axe. Il en vient à exalter non seulement l’énergie vitale du guerrier, mais l’énergie de celui qui est appelé à combattre toutes les puissances du mal, pour faire triompher la pureté spirituelle, la vérité, le don de soi et la fraternité universelle des vivants.

Texte 2

Couplé avec Varuna, l’équivalent indien d’Ouranos, Mithra est à l’origine, Mithra est à l’origine un dieu védique qui prête bien des traits au Mithra iranien. Lequel inspire à son tour plus d’un symbole christique. Le Mithra védique que décrit Georges Dumézil est un dieu souverain, fonctionnel, complémentaire cosmique de Varuna (l’équivalent de l’Ouranos grec), et rarement distingué de lui par le Rig-Véda dans l’organisation de la création, même si leurs modes d’actions sont différents. D’après l’hymne qui lui est consacré, Mithra est “ trés favorable ”, roi “ au bon pouvoir temporel ”, ordonnateur, tandis qu’on implore Varuna pour ne pas être livré à l’arme mortelle, à la fureur du roi courroucé. Mithra incarne ainsi le jour, Varuna la nuit ; Mithra est le bienveillant, l’amical, le lumineux, celui qui réfléchit, celui qui est proche de ce monde-ci, alors que Varuna est le justicier, le vigoureux, le redoutable, celui qui agit, le ténébreux, le lointain qui est de l’autre monde. La paix solaire de Mithra s’oppose à la violence nocturne de Varuna. - Mithra, son homologue iranien qui procède de la même origine indo-européenne, perd quant à lui son dieu complémentaire et se charge progressivement de certains de ses traits. Toujours lumineux, certes, il voit tout et dispose de mille espions. Son nom évoque la notion d’alliance fondée sur un contrat, il est le gardien de la loyauté et de l’amitié sincère, le témoin par excellence. Les traitres sont ses ennemis et il favorise la prospérité des justes. - Il prend pourtant aussi des allures militaires : il est “ Mithra-aux-vastes-pâturages ” qui permet de conquérir de nouveaux territoires, n’hésitant pas à manier l’épée pour préserver la juste alliance et mener la guerre sainte contre les armées ennemies, ni même à recourir à la magie. Il a emprunté sa violence et son goût pour la guerre au Varuna des Védas. - Ecarté par la réforme du prophète Zoroastre au profit du dieu souverain Ahura-Mazda, Mithra est bientôt réintégré dans le corpus religieux comme une créature de Mazda - mais il lui arrive de le dépasser. Gardien de l’ordre social, il est le Sol invictus, le Soleil invaincu qui triomphe de tout ennemi. Son culte fondé sur des mystères connaît une extraordinaire fortune dans le monde romain durant les cinq premiers siècles de notre ère. En 274, Aurélien, institue le culte officiel de Sol invictus dont l’empereur est l’émanation. Julien l’Apostat est son sectateur fervent. On a retrouvé nombre de vestiges de ces temples mithraïques (mithraea) que les légionnaires romains construisaient pendant leurs campagnes ou près de leurs garnisons pour pratiquer les initiations, tandis qu’à Rome, les mithraea voisinent avec les tombes des chrétiens des catacombes. - Le culte du Soleil invincible est marqué par un repas qui commémore celui qu’avaient partagé Mithra et le Soleil après la création du monde. On retient pour sa date de naissance le 25 décembre, date du solstice d’hiver dans le calendrier julien et par là même commencement du retour de la lumière (voir Midi/Minuit). On le représente avec un globe dans la main, tandis qu’il touche le zodiaque de l’autre. Il est entouré des quatre éléments, des quatre vents et des quatre saisons. On lui sacrifie aussi des taureaux (cérémonie torobole), peut-être en souvenir de l’élimination en Inde du monstre Vrtra par Indra, ce qui avait déclenché le cycle cosmique et permis au soleil de briller, aux eaux de couler, aux plantes de pousser. - L’initiation mithraïque se faisait selon sept degrés (le corbeau, le griffon, le soldat, le lion, le Perse, le Courrier du Soleil et le Père), qui correspondraient aux sept planètes dont il fallait traverser les sphères et vivre l’état psychique et spirituel qu’elles commandaient pour parvenir à la béatitude (voir échelle). Cette idée de perfectionnement moral et spirituel fait apparaître progressivement le mithraïsme comme une religion du salut. Mithra l’invincible ne meurt pas ; il monte à l’arrière du char du Soleil pour prononcer le jugement suprême au Ciel : le gardien des contrats reprend ainsi la fonction instaurée par Zoroastre, qui avait le premier rendu nécessaire dans la religion perse la sanction morale dans l’Au-delà. Durant la fin de l’empire romain, le mithraïsme se répandit jusqu’au nord de l’Angleterre, sur les bords du Rhin et du Danube, mais aussi en Syrie et en Egypte. Mithra, “ né de la pierre ”, fut alors en concurrence avec le christianisme naissant, auquel il prêta bien des traits - jusqu’à ce que Tertullien établît que le Christ était le seul “ Soleil invincible ”.

Texte EU

Mithra est beaucoup plus ancien que le mithraïsme. On réserve le terme de mithraïsme au courant religieux que les mystères mithriaques ont véhiculé dans l’Empire romain du Ier au IIIe siècle de notre ère. Comment s’est formée, voire transformée, cette religion de salut ? Par quelles voies, dans quelles conditions historiques les mystères de Mithra ont-ils gagné l’Occident romain ? Quel impact ont-ils eu dans la conscience religieuse et la société du monde romain ? Autant de questions inégalement éclaircies.
Mithra indo-iranien et achéménide
La place et la fonction du Mithra indo-iranien préfigurent certains aspects du Mithra gréco-romain ; elles expliquent la prééminence du dieu tauroctone dans le mithraïsme occidental. Mithra est le dieu du contrat. Le védique mitra signifie “ ami ” ou “ contrat ”. C’est à ce titre qu’on l’invoque dans les traités, mais aussi en considération de sa souveraineté céleste. Il représente l’aspect juridique de la fonction royale, comme l’a démontré Georges Dumézil. Il s’oppose à Varuna, autre dieu de la souveraineté, comme le jour à la nuit ou comme ce monde à l’autre. Bienveillant, proche de l’homme, ce dieu de la lumière veille sur les justes et la justice, sur le respect des alliances et des serments qui les consacrent.
Mithra subit faiblement le contrecoup de la réforme monothéiste et dualiste de Zarathustra. Bien qu’il fût au nombre des dieux que le prophète semble avoir éliminés du culte ou du moins ignorés, on s’est demandé si le nom d’Ahura Mazda n’avait pas remplacé le couple Mitra-Varuna dans l’ordre inverse, Ahura représentant Varuna et l’épithète Mazda l’aspect bienveillant de Mitra : hypothèse aventureuse. Mais il est certain qu’Ahura Mazda, dieu céleste et gardien de la justice, intègre certains aspects majeurs du Mithra indo-iranien. À l’époque achéménide, le nom de Mésoromazdès, transcription grecque citée par Plutarque, atteste que Mithra était solidaire du “ seigneur sage ”, Ahura Mazda-Oromazdès. Le Yast X de l’Avesta (dernier quart du Ve siècle av. J.-C.) célèbre Mithra comme un dieu de l’aurore “ qui se lève sur le mont Harâ ”, qui protège les contrats et les troupeaux ; dieu des combattants qui donne la victoire et la prospérité, dieu guérisseur aussi, il est secourable à ceux qui l’invoquent, mais redoutable aux transgresseurs du serment. Le garant du contrat en est devenu le défenseur armé.
Mithra paraît donc avoir absorbé les attributions guerrières du védique Indra, qu’il partage avec Verethragna. Dieu du jour, le plus brillant des Yazatas ou “ adorables ”, il combat le ténébreux Angra Mainyu, le futur Ahriman. Il veille sur les pâtures à un double titre : comme gardien de l’ordre juridique, donc de la propriété, mais aussi comme garant de la prospérité en faisant tomber la pluie. À bien des égards, le Mithra du mithraïsme restera un dieu pastoral et guerrier.
Il protège la création d’Ahura Mazda, comme Anâhitâ qu’on lui accouple cultuellement ; aussi Hérodote prend-il Mithra pour une déesse.
L’épigraphie officielle d’Artaxerxès II Mnémôn honore Ahura Mazda, Mithra et Anâhitâ. Les rois de Perse juraient par Mithra. Le septième mois (Juin) de l’année lui était consacré. Le grand roi participait personnellement à ses fêtes par des libations et des danses sacrées. Incontestablement, Mithra avait déjà au IVe siècle une place privilégiée dans la religion des Achéménides. Mais ce culte officiel n’a rien de mystérique. On a conjecturé que le mithraïsme s’était élaboré dans un milieu babylonien, parmi les adorateurs de daêvas dont Xerxès prohiba les pratiques (R. C. Zaehner) ; mais les preuves manquent. C’est à l’époque hellénistique et en Asie Mineure que les témoignages se font plus nombreux, sinon plus démonstratifs.
Mithra hellénistique
Dans l’Asie Mineure des diadoques, les dynastes d’origine iranienne (et dont certains revendiquaient une hérédité achéménide) ont favorisé les premières contaminations gréco-orientales qui allaient ouvrir le chemin de l’Occident à un mithraïsme hellénisé. Le nom théophore Mithridatès ou Mithradatès qu’ont porté des rois de Pont, d’Arménie et de Commagène atteste qu’ils vénéraient en Mithra le garant divin de leur autorité. Les monnaies de Mithridate Ier, roi des Parthes (171-138), portent au revers une figure d’archer comparable à l’Apollon des tétradrachmes séleucides ; dans l’empire hellénisé des Arsacides, on l’identifiait peut-être avec Mithra. En tout cas, dans l’inscription fameuse qu’Antiochus Ier, roi de Commagène (69-38 av. J.-C.), fit graver au Nimrud-dagh, on lit l’équation remarquable : Apollon-Mithras-Hélios-Hermès. Un bas-relief nous montre le dieu serrant la main droite du roi en signe d’alliance et de protection. L’identification de Mithra et d’Hermès, dieu psychopompe, intermédiaire entre les dieux d’En-Haut et d’En-Bas, le qualifie déjà comme médiateur entre Ormuzd et Ahriman : c’est le mésitès dont parle Plutarque (Is. et Os. , 46). Si l’hypothèse de Dörner est exacte, le plus ancien mithraeum connu se trouverait à Arsameia du Nymphée, au flanc sud d’Eski-Kale. Antiochus Ier érigea non loin de là un monument à la gloire de son père, Mithridate Ier, dont un bas-relief représente l’investiture par les soins d’Héraclès, homologue grec de Verethragna-Artagnès, fidèle compagnon de Mithra.
C’est vers la même époque, en 67 avant J.-C. précisément, que Plutarque situe l’introduction en Italie des mystères mithriaques. Les pirates ciliciens, naguère alliés à Mithridate VI Eupator, roi de Pont, pratiquaient dans leurs montagnes des sacrifices étranges et un rituel d’initiations qu’ils auraient été les premiers à enseigner en Occident, une fois capturés par Pompée. Ce témoignage explicite mérite considération. Les seules monnaies impériales où figure Mithra tauroctone ont été frappées – trois siècles plus tard, il est vrai, sous Gordien III – à Tarsos, en Cilicie. Un autel mithriaque a été découvert à Anabarzos. D’Ariaramneia en Cappadoce, immédiatement au nord-est de la Cilicie, provient la plus ancienne inscription qui fasse état d’une consécration personnelle (sacerdotale ou mystérique ?) à Mithra : elle date du Ier siècle avant J.-C. (Corpus inscriptionum et monumentorum religionis Mithriacae , I, 59). On comprend d’ailleurs fort bien qu’une organisation de résistance armée à l’impérialisme romain ait voulu lier ses membres par un rituel occulte qui les engageait sous la foi du serment. La consécration mystérique était réservée aux hommes et offrait certains aspects typiques des sociétés secrètes à caractère militaire, par exemple le grade du soldat (miles ) : d’où l’attirance que le mithraïsme exercera sur les légionnaires romains. Les pirates ciliciens se retranchaient, pour célébrer leur culte clandestin, dans des grottes dont les mithraea du monde romain garderont l’apparence interne. Aussi apparaît-il douteux que les “ mages hellénisés ” ou magousaioi d’Asie Mineure aient joué dans l’élaboration et la diffusion des mystères le rôle que leur attribuait F. Cumont. De fait, le mithraïsme n’a rien d’une religion cléricale, comme le prouvent son recrutement et sa hiérarchie initiatique ; il n’était pas desservi par un corps de prêtres professionnels, comme d’autres cultes orientaux. Il restera une religion de soldats assermentés.
Mithra romain
Ce sont des soldats qui ont importé Mithra en Italie. Les premiers témoignages de cette transplantation remontent à l’époque flavienne. En 71, Vespasien annexe la Commagène. On y recrute désormais des cohortes d’archers auxiliaires. L’installation à Carnuntum de la XVe légion Apollinaris, venue d’Orient, contribuera sans aucun doute aussi à l’expansion du mithraïsme en Pannonie et dans la vallée du Danube. Vers 80-90, Stace décrit “ Mithra qui, sous les rocs de l’antre persique, maîtrise les cornes du taureau rétif ” (Thébaïde , I, 717-718). Le type plastique du dieu tauroctone est dès lors fixé, sinon déjà populaire. Vers 102, un esclave de T. Claudius Livianus, préfet du prétoire, dédie à Mithra le plus ancien groupe connu. On ignore où et quand un sculpteur eut l’idée d’adapter à l’imagerie mithriaque le motif grec de la Nikè tauroctone. Mais que Mithra l’Invaincu ou l’Invincible (Inuictus ) ait remplacé une personnification de la victoire n’est pas le fait du hasard.
Durant le IIe siècle après J.-C., le mithraïsme s’implante solidement à Rome et en Italie, dans certains ports de la Méditerranée occidentale, mais surtout dans les colonies militaires, les villes de garnison, en Afrique, en Bretagne, en Gaule, sur les bords du Rhin et du Danube, à Doura-Europos sur l’Euphrate. Un mithraeum fonctionnait à Memphis. Mais paradoxalement l’Asie Mineure n’a guère livré de sanctuaires mithriaques. Ces transplantations donnent lieu à des syncrétismes locaux ; en Thrace, le culte du dieu cavalier fusionne avec celui de Mithra ; en Gaule et en Espagne, Mercure fait cause commune avec le dieu iranien. À Rome, Mithra jouit de l’appui officiel à partir de Commode qui se fait initier pour complaire aux soldats, et les mithraïstes multiplient les dédicaces “ pour le salut ” (pro salute ) de l’empereur. Dans l’entourage des Sévères, au Palatin, Mithra a ses fidèles toujours plus nombreux. L’important mithraeum qui se trouve sous l’église Santa Prisca sur l’Aventin est alors en service. Si Tertullien se réfère si volontiers au rituel des mithraïstes, jusqu’à les donner en exemple aux chrétiens dans le De corona , c’est que ce fils de militaire connaît leur exaltation et le rayonnement de leur doctrine dans l’Afrique proconsulaire. Au IIIe siècle, le mithraïsme concurrence dans l’armée et l’administration un christianisme en plein essor. Il faillit devenir la religion officielle de l’Empire lorsque Aurélien voulut réunifier la conscience religieuse du monde romain autour d’un culte solaire, celui de Sol inuictus , puis quand les tétrarques Dioclétien, Galère et Licinius invoquèrent Mithra comme le Fautor (c’est-à-dire le garant) de leur pouvoir (Corpus inscriptionum latinarum , III, 4413). D’où le mot de Renan : “ Si le christianisme eût été arrêté dans sa croissance par quelque maladie mortelle, le monde eût été mithriaste. ” Mais le christianisme se portait mieux que jamais. Malgré les dévotions de l’empereur Julien et des sénateurs païens, le culte persique sombra dans l’indifférence et l’oubli après 400. Il n’avait pas pénétré massivement dans les couches populaires de la campagne et des villes.
Les sanctuaires de Mithra
Le mithraïsme est resté une religion de petits groupes, comme en témoignent les dimensions souvent très modestes des mithraea. Celui delle pareti dipinte à Ostie ne pouvait guère contenir qu’une douzaine de convives. À l’origine, le mithraeum est une caverne. On a plus tard légitimé philosophiquement et mythiquement les sanctuaires rupestres en attribuant à Zoroastre la consécration d’un antre fleuri, image du cosmos, comme la caverne de Platon. À Bourg-Saint-Andéol, le mithraeum s’appuie à une paroi rocheuse entaillée ; ailleurs il s’agit de vraies grottes plus ou moins aménagées, souvent d’une crypte à demi enterrée. Quand le sol ne se prêtait pas à des constructions souterraines, on bâtissait à l’air libre ; extérieurement le sanctuaire pouvait avoir, comme à Londres, l’aspect d’une basilique chrétienne. Intérieurement, il était toujours aménagé en “ salle à manger ” : deux banquettes en maçonnerie (podia ) où s’allongeaient les mystes bordaient un couloir de service aboutissant à l’image cultuelle de Mithra tauroctone. Cette espèce de nef était souvent précédée d’un local servant de vestibule ou de vestiaire pour les ornements cultuels. Les figures en bas relief ou en ronde bosse des deux dadophores tenant l’un sa torche levée (Cautès), l’autre sa torche abaissée (Cautopatès) se dressaient de part et d’autre soit de l’accès au couloir central, soit de Mithra tauroctone. D’autres idoles, comme celle du Temps divinisé, un monstre à gueule de lion enserré dans les spires d’un serpent, étaient érigées à côté de Mithra ou à l’entrée de la nef.
On prenait là des repas en commun, banquets d’immortalité, si l’on veut, en tout cas de confraternité sacramentelle. Justin le Martyr dit qu’on y servait du pain et une coupe d’eau en prononçant certaines formules. Il n’affirme pas qu’on y consacrait du vin. Mais, dans les comptes du mithraeum de Doura, les frais de pain et de vin sont inscrits en tête. Le bas-relief d’Heddernheim montre le Soleil offrant une grosse grappe de raisin à Mithra. Les “ Lions ” de Santa Prisca portent des cratères à vin. Les fouilles ont exhumé des coupes et des gobelets utilisés dans ces banquets. Les mithriastes consommaient, si possible, la chair d’un taureau, en souvenir du repas qui avait réconcilié leur dieu avec le Soleil. Faute de taureau, on se contentait de moutons, de chèvres ou de volailles. Des offices quotidiens (matin, midi et soir) réunissaient les membres de ces confréries étroites. Le septième jour de la semaine – notre dimanche – était plus particulièrement sanctifié, tout comme le septième mois de l’année l’était déjà en Perse. On fêtait le 25 décembre comme l’anniversaire du Soleil (natalis Solis inuicti ), qui était aussi celui de Mithra né de la pierre (saxigenus ou “ pétrogène ”), comme le feu jaillit du silex : l’iconographie mithriaque montre le dieu émergeant des rocs en présence et avec l’aide des bergers.
Comme les solstices, les équinoxes devaient être l’objet de célébrations solennelles. D’une façon générale en Occident, les mithraea sont orientés en sorte qu’à l’équinoxe de printemps le soleil levant frappait directement l’image cultuelle de Mithra. Ses deux génies parèdres, personnifiant respectivement les Soleils de printemps et d’automne, formaient avec Mithra une sorte de trinité (cf. l’arbre à trois têtes de Dieburg et le Mithra triplasios de Denys l’Aréopagite : Ep. , VII, 2, 1081 A). Suivant les régions et les climats du monde romain, Cautès s’identifie avec la période verdoyante, Cautopatès avec la période stérile de l’année, ou inversement. D’autres symbolismes concernant la descente des âmes dans le monde terrestre et leur remontée au ciel peuvent s’être greffés sur cette imagerie, comme le suggèrent les recherches (très contestées) de Leroy A. Campbell.
Le sacrifice du taureau
La tauroctonie est au premier plan de cette bible en images que constituent les bas-reliefs mithriaques, comme au centre de la liturgie commémorative des banquets sacrés. Mithra poursuit le taureau, s’agrippe à lui, le garrotte, le traîne par les pattes de derrière jusqu’à un antre où l’animal est frappé au cœur par l’épaule gauche. Plusieurs représentations montrent Mithra chevauchant le taureau. C’est l’histoire d’une capture, qui rappelle certains travaux d’Héraclès. Quelle en est la signification ? (Masson 1998 : sur le dos de la constellation du Taureau se trouve les Pléïades, la Maison Dieu, le Coeur de l’Univers ! Est-ce à dire que “ frapper le coeur du taureau est symboliquement de tuer Dieu et s’approprier ainsi la puissance Divine ? ”)
Le taureau est souvent figuré dans une sorte de barque ou de croissant lunaire. L’épithète avestique gauci j ra qualifie la lune comme “ renfermant la semence du taureau ”, et l’on sait par le néo-platonicien Porphyre que l’astre passait pour être source de vie, réservoir des âmes. En domptant et immolant le taureau, Mithra force les âmes à s’incarner ou du moins à animer le monde matériel. Aussi Porphyre l’identifie-t-il avec le démiurge. Sur les reliefs, on voit un serpent et un chien sucer le sang jailli de la blessure, tandis qu’un scorpion pince les parties génitales du taureau ; un bouquet d’épis sort parfois de la plaie ou de la queue. Mais, sept siècles plus tard, le Bundahisn enseigne qu’Ahriman, l’esprit du mal, tua le taureau primordial ; de sa moelle est issue la végétation, et de son sperme recueilli dans la lune procèdent les espèces animales.
On a supposé que le mythe de Mithra tauroctone transcrivait la version originelle ; les zoroastriens auraient postérieurement imputé à Ahriman la responsabilité d’un sacrifice sanglant qu’ils condamnaient par principe. H. Lommel a voulu reconnaître une préfiguration védique de la tauroctonie dans le meurtre de Soma auquel participe Mitra ; mais Soma, dieu de la pluie fécondante qui tombe de la lune, n’est pas un taureau et dans ce mythe indien Mitra n’est qu’un complice, d’ailleurs hésitant. On est revenu en définitive à l’interprétation de F. Cumont : la mort du taureau est primitivement le fait d’Ahriman, mais on l’a secondairement attribuée à Mithra parce que le dieu passait déjà dans Yast X pour faire croître la vie et la prospérité. Dans le mithraeum de Santa Prisca on célébrait la tauroctonie comme un acte de salut : Et nos seruasti eternali sanguine fuso. Le scorpion, animal d’Ahriman, pince les parties du taureau pour vicier la vie à sa source ; mais, en répandant le “ sang éternel ” de l’animal dont la mort fait vivre les êtres, Mithra sauve la création d’Ahura Mazda. La figuration du zodiaque au-dessus ou autour de la tauroctonie confère au sacrifice une grandeur cosmique. Il représente la victoire de la vie sur les forces du mal.
Initiation
L’initiation mithriaque comportait sept grades correspondant chacun à un astre ; le Corbeau, protégé par Mercure ; l’Époux (nymphus ), par Vénus ; le Soldat, par Mars ; le Lion, par Jupiter ; le Perse, par la Lune ; le Courrier d’Hélios (heliodromus ), par le Soleil ; le Père (pater sacrorum ), par Saturne. Des masques et des insignes appropriés caractérisaient les dignitaires de ces fonctions. Les Corbeaux servaient à boire ; les Lions brûlaient l’encens et purifiaient les mystes par le feu. Les Soldats étaient consacrés par une sorte de baptême et sans doute marqués au fer rouge. Sur chaque communauté veillait un Père ; le Père des Pères avait le rang d’un évêque métropolitain ou d’un pape.
Eschatologie
On montrait aux initiés une “ échelle à sept portes ”, sommée d’une huitième : image des cercles planétaires que l’âme gravirait après la mort ? Cette hypothèse reste discutable. Les mithraïstes se représentaient la fin du monde à la façon des stoïciens, comme une conflagration universelle. On racontait qu’après l’immolation du taureau Mithra était monté sur le char du Soleil. Cet épisode devait se renouveler à la fin des temps et Mithra embraserait le monde, comme Phaéton avait failli le faire. Il purifierait l’univers, comme les Lions éprouvaient les mystes par le feu. Mithra s’identifierait alors avec l’Aiôn léontocéphale, ce Temps dévorateur qui résorbe la création après l’avoir animée.
S. Wikander a soutenu que le mithraïsme était étranger au Mithra iranien. Pourtant des formules comme Nama Sebesio , les noms de Cautès, Cautopatès, de Mithra lui-même et l’épithète nabarzès trahissent leur origine persique. Mais le dieu s’est indéniablement occidentalisé. Aussi fut-il désavoué par les manichéens qui opposaient au “ vrai ” Mithra un “ faux Mithra ” chevauchant le taureau. Le mithraïsme est le produit d’une transplantation qui a réussi grâce à deux greffes, celles de l’astrologie et de la philosophie grecques.


Pléïades

Texte 2

Cette petite constellation composée de sept étoiles était autrefois tenue pour l’un des centres possibles du ciel. C’est pourquoi les Babyloniens l’appelaient la pierre du fondement et les Indiens, tout simplement, la Mère. Faisant partie de la grande constellation du Taureau, et relevant donc de ce signe astrologique, c’est en mai qu’elles apparaissaient en Grèce, où elles marquaient le retour de la navigation maritime après son arrêt en hiver. Selon certains mythes, il s’agissait de sept jeunes filles au service d’Aphrodite ou de sept colombes dédiées à la même déesse alors que, suivant d’autres versions, elles étaient les filles d’Atlas et de Pléione qui, poursuivies par Orion (destiné à devenir une autre constellation céleste), avaient été transformées par Zeus en étoiles. Leur aînée était Maïa qui, séduite et aimée par le roi des dieux, avait donné le jour à Hermès. Leur rôle de repère saisonnier est largement répandu puisque, au-delà de la Grèce, leur apparition marquait le début de l’année au Pérou ou l’arrivée de l’hiver en Asie centrale ou dans le Grand Nord. Elles sont également reliées à Orion, sous le même motif du désir et de la poursuite amoureuse, chez les Mandjias du Soudan où elles représentaient de jeunes vierges que cherchait à séduire Seto, la figure emblématique de ce peuple symbolisé par la constellation d’Orion.

Grâce aux fortes magnitudes des étoiles le composant, cet amas est visible à l'œil nu dans le ciel d'automne. Il est situé dans la constellation du Taureau à proximité de l'axe formé par les étoiles : Sirius (Grand Chien) - Ceinture d'Orion (Orion) - Aldébaran (Taureau).

Héliopolis

Egypte

Ville du soleil, comme l’appelèrent les Egyptiens, située dans la région du Caire, au nord de l’antique Memphis. Le clergé héliopolitain était une entité puissante qui avait à sa tête un grand prêtre ayant pour titre le “Grand des Voyants”. Un taureau sacré, le Mnévis, voué au soleil et sans doute puissant symbole des ardeurs génésiques créatrices, y était vénéré. Aménophis IV-Akhénaton lui donna droit de cité dans sa ville de l'“Horizon du Globe” (Akhétaton).

Sept Vaches

Egypte

Le “Livre des Morts”, véritable guide mystique du défunt, au cours de la traversée de son “purgatoire” était illustré de nombreuses vignettes, aidant souvent à mieux comprendre les formules magiques qui les accompagnaient. Les sept vaches (en compagnie du taureau fécondateur du troupeau) faisaient partie de cette grammaire illustrée se rapportant aux manifestations bienfaisantes de la nature auxquelles le mort s’intégrait. Point n’était besoin à Pharaon, ni au plus humble de ses sujets, de faire appel à un petit Bédouin du désert pour savoir que la succession des sept vaches grasses, puis des sept vaches maigres correspondait au rythme plus ou moins généreux des crues du Nil. Le vœux de tout Egyptien était de s’associer aux sept années d’abondance!

Ainsi, par une conséquence naturelle, dans le monde romain, Amon était Jupiter ; Ptah, Vulcain ; Isis, Vénus ; Thot, Mercure, Neith, Minerve. La plus évidente création de ce syncrétisme a été le culte de Sérapis, dieu-taureau, identifié ensuite à Osiris puis à Zeus.

“ des vaches assez souvent rouges, et dont quelques-unes étaient immolées, traînaient au tombeau les momies, que d’autre part la vache divine aussi bien que le taureau divin emportaient sur leur dos dans l’autre monde. ”

). - Le veau d’or de la Bible (Exode 32), symbole de l’idolâtrie des Juifs en l’absence de Moïse, représentait certainement une idole aux traits de taureau qui fut détruite par Moïse lors de son retour du Sinaï. –

Médée donne à Jason un flacon de liqueur de crocus caucasien, dont il s’enduit le corps pour se protéger du feu que jettent les naseaux des taureaux qu’il doit mettre au labour avant d’affronter le dragon. “ Grâce au kermès, le vieux chêne hermétique sert de mère au mercure secret de l’Oeuvre. ”

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